- 1. Utilité politique du mythe romain
- 2. Le roman toscan : unité artistique de « pays » rivaux ?
- 3. Une « renaissance » avant la Renaissance ?
- 4. Artistes voyageurs
- 5. La Florence de Laurent le Magnifique
- 6. Comment la patrie de Michel-Ange devint le « salon de l'Europe »
- 7. « Retour à Florence » : collectionneurs et voyageurs passionnés
- 8. Florence, la ville contemporaine
- 9. Bibliographie
TOSCANE
Une « renaissance » avant la Renaissance ?
La première renovatio de l'art toscan n'est pas un phénomène florentin. À Pise, avec la construction de la piazza dei Miracoli, formée de la cathédrale dont la façade a des allures de temple, conçue en 1063, après la victoire de Palerme, complétée par le baptistère commencé en 1153, puis par le campanile à l'inclinaison contrôlée sur ce terrain instable (1173-1350), et enfin par le cimetière du Campo Santo, reliquaire immense fait pour conserver de la « terre sainte » rapportée par les navires pisans, naissait un ensemble monumental qui prit valeur d'archétype. En 1260, Nicola Pisano (vers 1225-1287) sculpte la chaire du baptistère, son fils Giovanni (vers 1250-1314), maître d'œuvre ambitieux, apôtre d'un puissant retour à l'antique – qu'il connaissait surtout par des sarcophages tardifs –, crée des chaires, cathédrales dans la cathédrale, à Pise, à Sienne, à Saint-André de Pistoia. Il est significatif que Cimabue (vers 1240-1302), en qui Vasari saluait l'inventeur de la peinture, ait décoré le Dôme de Pise d'une mosaïque de Saint Jean. Son style, moins en rupture avec la peinture d'icônes « grecque », elle-même alors en mutation, que l'on a voulu le répéter à la suite de Vasari, ouvre, selon Dante qui le cite, la voie à Giotto. On peut ainsi retracer, dans les textes littéraires, une généalogie des « renaissances » successives : Cimabue, Giotto, Masaccio, Léonard et Michel-Ange. C'est le projet de Vasari, le Florentin : il fournit, par cette belle architecture didactique, des repères commodes et donne cohérence et fin à l'histoire de l'art toscan. Dans la Toscane du xiiie siècle, chaque cité s'identifie à un artiste : Sienne, par exemple, à Duccio di Buoninsegna (vers 1260-1318/19), proche de Cimabue, dont la Maestà ouvre l'histoire de l'école siennoise. À Assise, le chantier de la basilique de Saint-François, entrepris en 1228, devient l'un des plus actifs de l'époque gothique : en Ombrie, hors du champ clos de la Toscane, il permet aux Florentins et aux Siennois de s'affronter, de collaborer, d'enrichir leurs techniques d'influences réciproques. Y ont travaillé en effet Cimabue, Giotto et ses collaborateurs, ainsi que les Siennois Pietro Lorenzetti et Simone Martini.
Giotto di Bondone (1266/67-1337) occupe une place prépondérante dans la vie artistique : son école compte de grands artistes, Taddeo Gaddi (vers 1300-vers 1366), Maso di Banco (vers 1300), Bernardo Daddi (vers 1300-vers 1348) – lui-même devenu en 1334, après son rappel à Florence, directeur de tous les travaux d'urbanisme, contrôle l'édification de la cité. La ville du florin, en pleine expansion, vient de commencer d'édifier, en 1284, sa troisième enceinte. La nouvelle esthétique spatiale qu'inaugure Giotto influence, au-delà de la Toscane, la culture figurative européenne. C'est sans doute après lui que l'image de l'homme universel ne cessa de hanter les artistes florentins : Giotto est le premier de ceux qui prétendirent, d'Alberti à Léonard de Vinci et Michel-Ange, incarner tous les arts.
L'influence des Siennois sur les giottesques est incontestable. On ne saurait plus présenter l'école siennoise de Simone Martini (1284 ? – 1344), des frères Pietro (actif de 1305 ? à 1345) et Ambrogio Lorenzetti (actif de 1319 à 1348), comme éternellement retardataire, archaïsante, face à sa rivale florentine, novatrice, inventive – quoique, pour faire bonne mesure, moins « raffinée ». D'autant que la génération qui suivit la mort de Giotto, marquée par la récession économique et le choc de la peste de 1348 – celle qu'évoque Boccace dans son Décaméron composé dans les années qui suivirent –, s'orienta vers des créations[...]
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Écrit par
- Adrien GOETZ : agrégé de l'Université, ancien élève de l'École normale supérieure, maître de conférences à l'université de Paris-IV-Sorbonne
- Michel ROUX : professeur émérite
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