TOUAREG
Le Mali et le Niger face à la rébellion touarègue
Le 7 mai 1990, la ville de Tchin Tabaraden, située à quelques centaines de kilomètres au nord-est de Niamey, capitale du Niger, est le théâtre d'un incident isolé entre quelques Touaregs et des gendarmes nigériens. Relativement anodin, cet affrontement dégénère pourtant rapidement, dressant les campements touaregs de la région contre l'administration nigérienne, avant de déborder sur les territoires maliens voisins de l'Azawad (ou Azawagh) et de l'Adrar, où des accrochages entre Touaregs et militaires maliens étaient signalés dès 1989. Amorçant le cycle bien connu de la violence et de la répression, la révolte des Hommes bleus marque le début d'un conflit sanglant aux profondes implications nationales et régionales.
Cette nouvelle « guerre des sables » entre les Touaregs nomades et les appareils étatiques nigérien et malien part d'un contentieux très localisé : le détournement de l'aide internationale destinée aux camps d'exilés installés au Niger. Ces Touaregs avaient gagné l'Algérie ou la Libye en trois vagues successives : la première, au début des années 1960, fuyait le régime radical de Modibo Keita, au Mali ; les deux autres y avaient été poussées par les deux grandes sécheresses des années 1970 et 1980. Leur nombre – plus de 40 000 selon les autorités algériennes – devenant un fardeau difficile à supporter, un accord était conclu avec le Niger, en vertu duquel la grande majorité d'entre eux se trouvait rapatriés vers ce pays, mais pour s'entasser dans des camps de fortune. C'est donc la mauvaise gestion de l'aide internationale qui leur était dévolue, combinée avec les comportements vexatoires des autorités nigériennes, qui mit le feu aux poudres.
L'affaire prend d'emblée un tour d'autant plus dramatique que la réaction de l'administration nigérienne est extrêmement violente. L'armée et les forces de police se signalent par des exactions dont les principales victimes sont des civils souvent étrangers à la révolte, cependant que l'attitude du gouvernement de transition démocratique qui succède au régime autoritaire d'Ali Saïbou est empreinte d'atermoiements et d'ambiguïtés, donnant l'impression aux Touaregs que les responsables des massacres demeurent impunis. La situation est encore plus alarmante au Mali, alors sous la férule de Moussa Traoré. Tandis qu'Amnesty International dénonce le comportement des forces armées dans la répression de la rébellion, le conflit s'exacerbe au point de provoquer la proclamation, en juillet 1990, de l'état d'urgence dans les régions nord du pays où s'établit un climat de totale insécurité.
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Écrit par
- René OTAYEK : directeur de recherche au C.N.R.S., à Sciences Po Bordeaux
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