TOURISME CULTUREL
Pour les étrangers, touristes ou non, l'image de la France est avant tout culturelle. Son histoire, son humanisme, sa littérature ont sans nul doute une portée universelle que matérialisent beaucoup de ses monuments prestigieux. De Versailles au Mont-Saint-Michel et des châteaux de la Loire à la tour Eiffel, ils sont l'expression d'un génie artistique en même temps que le signe le plus éclatant des réussites de son histoire. Les œuvres célèbres de ses musées sont, elles aussi, le reflet d'une histoire particulière dans la mesure où elles concernent la plus grande partie de l'Europe, et même du monde. Enfin, si la France n'a ni Salzbourg ni Bayreuth, ses rendez-vous de Cannes et d'Avignon en tiennent lieu pour le cinéma comme pour le théâtre, et les talents du monde entier ne dédaignent pas de s'y produire.
Une image trompeuse
S'il est évident que, même cumulée, l'offre culturelle de Paris reste inférieure à celle des régions, en termes de notoriété et donc de fréquentation, le déséquilibre est flagrant : le Mont-Saint-Michel ne reçoit que le quinzième des visiteurs de Notre-Dame et le plus fréquenté des musées de province n'atteint pas le cinquantième de ceux du Louvre... À ce constat ne peut être apportée d'explication simple. La diversité des thèmes culturels, le grand nombre des sites, leur forte connotation historique (Louis XIV, Napoléon Ier...), l'importance de la population résidante, le fait que le financement de nombreux monuments, musées et théâtres de la capitale soit assumé en totalité par l'État, au contraire du reste de la France, figurent parmi les raisons les plus évidentes ; la très forte médiatisation internationale dont ont bénéficié les nouvelles réalisations a définitivement assis la notoriété mondiale de ce que l'on connaissait déjà, au début du xxe siècle, comme la ville de la Déclaration des droits de l'homme, la ville intellectuelle, la ville artiste, la Ville lumière.
Ce faisant, Paris, cité phare de la culture, rejette dans l'ombre les richesses nombreuses et bien réelles des provinces. Celles-ci, à quelques exceptions près, ne conservent d'image, pour les touristes étrangers, que « monumentale » : le Mont-Saint-Michel, les châteaux de la Loire, celui du Haut-Kœnigsbourg, les cathédrales de Chartres et de Reims, Carcassonne... Même les quartiers anciens des « villes d'art et d'histoire », dont beaucoup offrent une architecture magnifique, Aix-en-Provence, Autun, Bordeaux, Lyon, Montpellier, Nancy, Rouen, Toulouse par exemple, et les plus beaux villages ont du mal à rivaliser avec le Marais... Ainsi tout se passe comme si l'ensemble de la France, son art de vivre, sa gastronomie, ses sites naturels ou archéologiques, ses châteaux ne servaient que d'écrin à un unique joyau, Paris.
Pourtant à côté des richesses culturelles « classiques » : monuments, musées, festivals, des offres nouvelles se sont développées. Mais, trop récents et trop mal soutenus, patrimoine archéologique, industriel et maritime, écomusées et musées de société ne parviennent que très progressivement, et en tout cas trop peu, à trouver leur public. L’offre demeure donc encore trop traditionnelle, et surtout insuffisamment mise en valeur. Ce vieillissement, alors même que des efforts réels de rénovation ont été faits dans les musées et les monuments, est porteur de menaces pour l'avenir, dans la mesure où simultanément, bien qu'imperceptiblement, la demande évolue.
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Écrit par
- Michel COLARDELLE : conservateur général du patrimoine, directeur du Musée national des Arts et Traditions populaires et du Centre d'ethnologie française
- Alain MONFERRAND : secrétaire général du Conseil national du tourisme, directeur de l'Observatoire national du tourisme
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