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TOURISME CULTUREL

Est-il souhaitable de développer le tourisme culturel ?

La question est très controversée. Le tourisme peut aussi avoir des effets négatifs sur le patrimoine : usure prématurée des monuments, comme dans les appartements royaux de Versailles ; dégradations involontaires ou vandalisme sur les gravures de l'Âge du bronze dans la vallée des Merveilles... Les exemples ne manquent pas pour dénoncer la surfréquentation et ses effets nocifs. Un site culturel où l'on se presse au-delà de toute raison perd de la sorte tout charme et souvent tout sens, et sa visite peut décourager au lieu de favoriser un contact avec l'art, l'architecture ou l'histoire, qui nécessitent un minimum d'intériorité.

Nombreux sont ceux qui tirent argument des devoirs de la conservation – responsabilités devant les générations futures – et de l'intimité indispensable à la contemplation artistique pour récuser le tourisme culturel. D'autres – ils sont cependant de moins en moins nombreux – pensent que la culture est un bien identitaire dont le partage risque d'atténuer l'authenticité et d'en briser le caractère quasi religieux. D'autres encore craignent que les nécessités d'une compréhension par le plus grand nombre n'entraînent une vulgarisation, au sens péjoratif du terme, une baisse de qualité ; il est vrai que parfois, au cours de la visite commentée de tel ou tel monument ou site, des préoccupations mercantiles se devinent qui priment à l'évidence sur la recherche de la qualité culturelle.

Comment répondre à ces objections ? On examinera d'abord le problème de la conservation : pour une vingtaine de lieux culturels qui, en France, souffrent quelques semaines par an de surfréquentation, il en est des centaines, voire des milliers qui manquent de visiteurs et qui, ne générant pas d'activités économiques suffisantes, constituent pour la collectivité ou pour leur propriétaire une charge financière insupportable. Ceux-là se dégradent ou risquent de se dégrader si les mutations économiques actuelles se poursuivent. En réalité, s'il est exact que certains lieux souffrent, c'est par une diversification et une multiplication de l'offre qu'il faut réagir, en « diluant » le tourisme excédentaire. Au château de Versailles, où il est pratiquement impossible de détourner les visiteurs de la galerie des Glaces, ont été expérimentées avec succès des activités (visites à thème élargissant les sujets habituels de la journée royale à la vie quotidienne de la cour, animations musicales et concerts, etc.) et des formes de réception (création d'un bureau d'accueil permettant aux visiteurs de choisir d'avance leur thème, leur horaire, leur mode de visite – recours à un conférencier, audioguidage – multiplication des points d'accueil et d'entrée, etc.). Ainsi parvient-on à lutter efficacement contre les excès de fréquentation tout en élargissant le champ culturel. Le renvoi d'un centre d'intérêt à un autre par des circuits thématiques, l'organisation d'événements dans des lieux peu connus sont quelques-uns des moyens techniques que l'on peut utiliser. La prime à la notoriété (un site classé trois étoiles dans un guide touristique reçoit des millions de visiteurs ; deux étoiles, des centaines de milliers ; une étoile, des dizaines de milliers) a des effets négatifs que l'on peut atténuer si les sites phares aujourd'hui surfréquentés irriguent les autres, et si l'on cultive les véritables jachères que constituent les patrimoines méconnus.

La question de savoir si la culture est ou non une richesse à partager avec d'autres est plus philosophique. À ceux qui pensent qu'en se démocratisant et en s'adressant à un public « de masse » elle perdra fatalement sa qualité, on répondra que la connaissance[...]

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Écrit par

  • : conservateur général du patrimoine, directeur du Musée national des Arts et Traditions populaires et du Centre d'ethnologie française
  • : secrétaire général du Conseil national du tourisme, directeur de l'Observatoire national du tourisme

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Médias

Le Mont-Saint-Michel - crédits : G. Sioen/ De Agostini/ Getty Images

Le Mont-Saint-Michel

Cathédrale de Reims, le chevet - crédits : Bridgeman Images

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