TOURNOIS, monnaie
Monnaie extrêmement répandue au Moyen Âge (le nom de tournois vient de la ville de Tours, où le chapitre de Saint-Martin battait monnaie au viiie siècle). On a, au temps de Pépin et de Charlemagne, des deniers d'argent aux effigies de ces princes, portant la légende Sancti Martini. Ce droit de monnayage paraît avoir été supprimé par le capitulaire de Thionville, en 805 ; car, après cette date, le monnayage semble être purement royal, les deniers portant simplement pour légende Turonis, Turones.
Sous Charles le Simple, en 919, le duc abbé de Saint-Martin, Robert, frère du roi Eudes, obtint à nouveau le droit de monnayage pour son abbaye. À partir de cette date, l'abbaye frappe une monnaie dont certains types s'imposèrent à toute l'Europe : le plus célèbre porte, au droit, Carlus Rex autour d'un temple, et au revers, Sancti Martini moneta autour d'une croix cantonnée de quatre points. On trouve aussi, au droit, Caput sancti Martini (autour du buste du saint), et au revers, Turonus civitas (autour d'une croix).
Le buste de saint Martin fut copié avec d'infinies variantes par tous les seigneurs battant monnaie dans les environs de Tours ; il finit par s'altérer au point de ne plus figurer qu'un vague profil humain, connu en numismatique sous le nom de type chartrain. On le retrouve, jusqu'au xive siècle, sur les monnaies frappées à Chartres, à Blois, à Châteaudun, à Dreux, à Nogent-le-Rotrou, à Saint-Aignan.
Le denier tournois au temple fut longuement usité avant de s'altérer également et de se transformer en denier au châtel. Il persista même après que le nom du roi de France eut été substitué à celui de l'abbaye Saint-Martin.
Quand Philippe Auguste confisqua la Touraine, il ne supprima pas le monnayage tournois pour le remplacer par le monnayage parisis : il laissa à chacune des deux monnaies sa propre aire d'influence (cinq deniers tournois équivalaient à quatre deniers parisis).
Mais l'atelier de Tours devint un atelier royal. Le type de monnaie le plus courant, sous Philippe Auguste, porte au droit Philippus Rex, autour d'une croix pattée, au revers Turonus Civis, autour du châtel, qui n'est autre que le temple des premières monnaies tournois. Pendant deux siècles, le type du tournois fut copié et en usage dans la moitié de l'Europe, et transporté en Orient par les croisés ; les légendes seules diffèrent.
Saint Louis donna un nouveau rayonnement à l'atelier de Tours, en lui faisant frapper une pièce d'argent, le gros tournois, émis pour douze deniers tournois et pesant 4,10 g. Le gros tournois est du type du châtel et porte simplement en outre une légende au droit, en bordure, Benedictum sit nomen Domini nostri Jesu Christi et, au revers, une bordure de fleurs de lys.
Vers la fin du Moyen Âge, la monnaie tournois n'est plus que de la monnaie de billon ; extrêmement répandue encore au xvie siècle et au début du xviie, elle disparaît sous le règne de Louis XIV.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Jean DÉRENS : archiviste-paléographe, bibliothécaire à la bibliothèque historique de la Ville de Paris
Classification
Autres références
-
GROS, monnaie
- Écrit par Jean DÉRENS
- 382 mots
Depuis la réforme monétaire carolingienne, alors que l'habitude s'était instaurée de compter par deniers, sous et livres, on ne frappait plus en réalité que des deniers. Pour répondre aux besoins de la renaissance économique du xiiie siècle et également afin d'unifier la monnaie...
-
LIVRE, monnaie
- Écrit par Jean DÉRENS
- 349 mots
Unité de poids dont la valeur est variable, la livre servit très tôt d'unité monétaire dans la mesure où la taille de la monnaie fut établie d'après la livre : les sous d'or de Constantin étaient fabriqués à la taille de 72 par livre. C'est à l'époque carolingienne que fut instauré le système...
-
MONNAIE - Histoire de la monnaie
- Écrit par Michel BRUGUIÈRE
- 9 774 mots
- 7 médias
...indispensables par la multiplicité des monnaies d'origines diverses. Un marchand parisien pouvait avoir en caisse, en effet, non seulement des livres et sous « tournois », « parisis », « mansois » et « viennois », mais chacune de ces monnaies en deniers « forts », « bons », « faibles », suivant l'année d'émission.... -
PARISIS, monnaie
- Écrit par Jean DÉRENS
- 342 mots
Terme qui a désigné la monnaie royale de Paris. Bien que, de toute ancienneté, il y ait eu à Paris un atelier monétaire, le nom de parisis ne paraît pas antérieur au règne de Philippe Ier (1060-1108) : à cette époque, un certain nombre d'autres ateliers royaux furent soumis aux mêmes...