TOURS DE GRANDE HAUTEUR ou GRATTE-CIEL
Aspects techniques
Toujours délicate, la construction d'une tour est le fruit de calculs complexes : les fondations comme les matériaux doivent être plus résistants que dans un édifice classique, le vent restant le principal problème. Ses effets latéraux provoquent des déplacements de la structure qui peut osciller au sommet de plusieurs dizaines de centimètres. On raconte d'ailleurs que les occupants des premiers gratte-ciel américains désertaient les derniers étages, en proie au « mal de mer » occasionné par des balancements de plus de 30 centimètres. Et si les matériaux actuels offrent une bonne résistance, l'inévitable oscillation doit être contrecarrée par des amortisseurs pour assurer un meilleur confort, mais aussi résister aux séismes.
Au fil du temps, les principes constructifs évoluent. Après l'ossature métallique, on emploie aussi la structure poteaux-poutres-coque en béton, qui garantit la stabilité et le contreventement, mise en œuvre par de grands architectes-ingénieurs qui marqueront l'histoire, comme Maillart, Freyssinet ou Nervi.
Ensuite, on s'oriente vers des solutions qui assurent séparément le transfert des charges verticales et les contreventements : d'une part, une ossature extérieure relativement souple, et, d'autre part, un noyau central, avec son propre contreventement, incluant circulations et passage des fluides et gaines techniques. Pour augmenter la rigidité du bâtiment, on lui associe parfois des treillis verticaux qui font office de murs pour lutter contre le vent.
Toutefois, le noyau central rigide en béton qui abrite les circulations verticales présente plusieurs inconvénients : il induit des niveaux rigoureusement identiques, une architecture monolithique, surtout, il prend de la place – jusqu'au tiers de la surface du plateau. La rentabilité du plan est mise à rude épreuve. Enfin il pèse lourd, très lourd.
On développe alors des solutions mixtes avec, par exemple, un noyau central et une ossature métallique extérieure en diagonale, pour le John Hancock Center à Chicago en 1969. Les portiques en X, à la fois légers et rigides, permettent de travailler en tension et en compression plutôt qu'en flexion, avec néanmoins l'inconvénient d'occulter certaines fenêtres. Les Twin Towers du World Trade Center obéissaient à un principe similaire : un noyau et une structure extérieure de poteaux métalliques verticaux espacés d'un mètre seulement et reliés par des entretoises.
On évite les inconvénients d'un noyau central avec l'assemblage de tours minces, mis en œuvre dans la Sears Tower à Chicago (1974). Ce parti permet d'obtenir des tours à forme asymétrique, et d'un poids réduit, 161 kg/m2 pour 442 mètres de hauteur.
On peut opter aussi pour un noyau en acier contreventé par des portiques en forme de X qui diminue considérablement le poids de la construction. Ainsi, le John Hancock Center (100 étages) supporte seulement 140 kg/m2 contre 200 kg/m2 pour l'Empire State Building (102 étages).
Les concepteurs inventent ensuite des structures à noyaux éclatés, comme la Hong Kong and Shanghai Bank à Hong Kong (Foster et Ove Arup) : ce dispositif permet de créer un immense vide intérieur, libre de tout poteau ou à noyaux décalés sur un pignon, comme la tour Heron à Londres de KPF, ou celle de Doha, de Jean Nouvel. Ce dernier architecte a aussi expérimenté un noyau double décalé pour la tour Agbar à Barcelone. On mélange acier et béton, on expérimente même des tours à ossature bois d'une hauteur très modeste (de 10 à 12 étages) qui rappellent la naissance des gratte-ciel à Chicago.
Désormais, toutes les combinaisons, toutes les hauteurs, toutes les formes sont possibles grâce à l'utilisation des nouvelles technologies pour les calculs et les simulations, la construction proprement dite puis la gestion quotidienne.[...]
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Écrit par
- Élisabeth PÉLEGRIN-GENEL : architecte D.P.L.G., psychologue du travail
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