TOURS DE GRANDE HAUTEUR ou GRATTE-CIEL
Une tour pour quoi faire ?
L'Europe a beaucoup rêvé et relativement peu réalisé de gratte-ciel. Les tours d'Auguste Perret en 1922 et le plan voisin de Le Corbusier en 1925 n'ont pas vu le jour, comme de nombreux projets futuristes. Le Vieux Continent semble moins sensible que d'autres à la hauteur pour la hauteur, du moins jusqu'à présent.
Après la tour Eiffel, la France s'est longtemps reposée sur ses lauriers. Aujourd'hui, elle demeure profondément marquée par l'échec des barres et des tours des années 1960, qu'on démolit actuellement à grands frais. Cette réponse, dans l'urgence, à l'urgence de l'après-guerre reste synonyme de mal de vivre et de difficultés économiques et sociales. Cependant, dans quelques arrondissements, Paris a construit plus de cent cinquante tours, pour la plupart sur une dalle piétonne située au-dessus du niveau de la rue. Elles sont de faible hauteur par rapport aux envolées américaines ou asiatiques. La tour Maine-Montparnasse, la plus haute d'Europe jusqu'en 1989, inaugurée en 1973, culmine cependant à 209 mètres.
Alors que les Américains parlaient de gratte-ciel, les Français baptisent les leurs « I.G.H. », immeubles de grande hauteur. Une manière inconsciente de signifier qu'ils n'aiment guère ces machines à habiter. L'image de la « cage à lapins » a la vie dure, alors que beaucoup de tours, aux États-Unis ou dans les Émirats arabes sont associées à des appartements de très grand standing. Cependant, les enquêtes réalisées auprès des habitants des I.G.H. parisiens montrent que leurs occupants s'y plaisent et apprécient ce rapport surplombant avec la ville. Avoir choisi d'habiter dans les nuages demeure évidemment un facteur essentiel.
Pour des pays confrontés à une sévère crise du logement, les tours permettent de loger beaucoup de monde en un temps court, sur une emprise au sol limitée. La Chine couvre ses villes d'habitations hautes extrêmement denses dans des délais sans précédent.
Selon les cultures, le gratte-ciel abrite des appartements, des hôtels ou des bureaux, voire des silos de stockage de livres comme la T.G.B. (bibliothèque François-Mitterrand) à Paris. La mixité des fonctions se généralise dans les gratte-ciel les plus hauts, principalement en Asie. Au Japon, on place au sommet un musée ou un équipement, à la base des commerces et des hôtels et, au milieu, des bureaux. En France, les réglementations différentes selon la destination des locaux et surtout les habitudes ne favorisent pas ce mélange : les tours y sont monofonctionnelles et le plus souvent dévolues au travail. Mais les débats actuels sur la mixité pourraient faire évoluer cette situation, ne serait-ce que pour éviter de recréer des ghettos verticaux.
En revanche, la question de la réversibilité reste entière. Il est très difficile de transformer une tour de bureaux en appartements, et réciproquement. Il existe néanmoins quelques exemples étonnants de reconversion. Ainsi, des « tours fantômes » de Bangkok, dont la construction avait été brutalement interrompue lors de la crise financière de 1997/1998, ont retrouvé une nouvelle vie. Des programmes entièrement remaniés ont été insérés dans ces squelettes d'acier rouillé laissés à l'abandon pendant plusieurs années. Il en reste encore près d'une trentaine qui attendent un nouvel usage.
Les caractéristiques d'une tour
D'un bout à l'autre de la planète, les tours font désormais partie de notre paysage urbain, habitants ou utilisateurs se sont familiarisés avec elles. Pourtant, la tour ne laisse jamais indifférent (on aime ou l'on rejette) et supporte de fortes charges émotionnelles. Le débat récurrent en France depuis la tour Eiffel en témoigne. Après le « scandale » des tours visibles depuis le Louvre, une longue période d'immobilisme avait suivi.[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Élisabeth PÉLEGRIN-GENEL : architecte D.P.L.G., psychologue du travail
Classification
Média
Autres références
-
BOSTON
- Écrit par Laurent VERMEERSCH
- 1 593 mots
- 3 médias
Capitale de l’État du Massachusetts et principale ville de Nouvelle-Angleterre, Boston, avec ses 673 000 habitants en 2016, est au cœur de la dixième agglomération des États-Unis (4,8 millions d’habitants). Elle est également la deuxième agglomération de la mégalopole BosWash (Boston-Washington),...
-
BURNHAM DANIEL HUDSON (1846-1912)
- Écrit par Encyclopædia Universalis
- 648 mots
-
ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE (Arts et culture) - L'architecture
- Écrit par Claude MASSU
- 12 026 mots
- 9 médias
Associé à Dankmar Adler, Louis Sullivan s'est particulièrement illustré dans les gratte-ciel. Considérant l'édifice comme un organisme, il le divise en trois parties : base, partie intermédiaire, sommet, correspondant aux trois principales fonctions du bâtiment. Loin d'exprimer l'ossature en acier, il... -
FOSTER NORMAN (1935- )
- Écrit par François CHASLIN
- 2 109 mots
- 1 média
...britannique en territoire chinois, figurant d'ailleurs sur ses billets de banque, l'édifice passe pour la construction la plus onéreuse du xxe siècle. Gratte-ciel à la structure apparente, il est d'une hardiesse de conception inégalée. Il rompt radicalement avec l'esthétique lisse et dépouillée, en «... - Afficher les 14 références