TRAÇABILITÉ AGROALIMENTAIRE
Finalités et acteurs de la traçabilité agroalimentaire
La traçabilité a trois finalités principales. La première est la gestion publique et la prévention des risques sanitaires des aliments. Le producteur (agriculteur, industriel…) ou le distributeur doit fournir à ses clients des produits sains, propres à la consommation, sans risque d’infection ou d’empoisonnement. La protection du consommateur en matière de sécurité et d’hygiène alimentaires relève de l’activité réglementaire et répressive des autorités publiques. Dans ce cas, la mise en place de la traçabilité est obligatoire et liée à la réglementation qui fixe les règles sanitaires à respecter. Elle est un moyen de contrôler a posteriori que ces dernières sont effectivement respectées par les acteurs économiques. Elle est indispensable pour la mise en œuvre de procédures de rappel de produits ou l’interdiction de mises sur le marché lorsqu’un effet indésirable est détecté.
La deuxième finalité de la traçabilité est de crédibiliser l’information donnée au consommateur sur une étiquette ou fournie à un client par un certificat de conformité. L’État est bien le garant de la loyauté de l’information et doit assurer une protection contre les fraudes et les tromperies – pourtant, ici, en général, la traçabilité n’est pas rendue obligatoire par l’État, mais seulement recommandée. Elle relève du choix de la stratégie et de l’organisation des acteurs économiques. La mise en place de cette traçabilité a donc d’abord des motivations commerciales et contractuelles. L’étiquetage ou la certification vise à garantir la véracité d’allégations que le consommateur ne peut pas vérifier par lui-même, mais qui ne mettent pas en jeu la sécurité hygiénique des produits. Ces allégations sont, par exemple, des informations relatives à des pratiques respectueuses de l’environnement (labels écologiques, logo AB…), à des règles éthiques (commerce équitable…), à la typicité des terroirs de production (A.O.C.). L’étiquetage et la certification visent ici à protéger les consommateurs contre des pratiques déloyales ou trompeuses. La traçabilité est un moyen pour garantir la fiabilité de l’étiquetage et de la certification. Elle est mise en place volontairement (sauf dans le cas des certifications officielles de qualité comme l’A.O.C., le label rouge, le logo AB) par les acteurs économiques désireux de défendre la qualité de leurs produits et leurs marques, qui engagent leur nom, leur réputation et leur responsabilité pénale.
La troisième finalité de la traçabilité est beaucoup plus récente et réunit les pouvoirs publics et les acteurs économiques. Leur préoccupation commune est d’anticiper les crises de sécurité sanitaire avec la volonté de limiter les possibles réactions dévastatrices de l’opinion publique et des consommateurs. La traçabilité est alors un outil d’anticipation des risques médiatiques, commercialement désastreux. Il s’agit de lutter par anticipation contre les comportements impétueux, voire la panique des consommateurs. Toutes les études menées dans les pays industrialisés ont montré que, dans leur grande majorité, les consommateurs sont très préoccupés par la sécurité sanitaire des aliments et sont très sensibles à la perception de risques réels ou supposés. Des comportements de doute ou de défiance peuvent bouleverser de manière spectaculaire les marchés alimentaires, en faisant chuter brutalement et durablement les achats et les prix, et en provoquant, in fine, la faillite d’entreprises ou de filières entières. Par exemple, en 2000, en France, lors de la deuxième crise de l’ESB, la consommation de bœuf a chuté de 30 p. 100 et les exportations de 40 p. 100 en deux mois.
Dans un contexte de conscience du risque médiatique lié, par exemple, aux O.G.M., à la maladie de la vache folle…, les acteurs[...]
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Écrit par
- Egizio VALCESCHINI : directeur de recherche à l'Institut national de la recherche agronomique
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