HAPPISBURGH TRACES DE PAS D'
Que nous apprennent les traces d’Happisburgh ?
Les traces de pas à Happisburgh représentent une découverte importante de par leur âge et la possibilité de mieux connaître les premiers homininés (hominidés du genre Homo) ayant occupé l’Europe. Elles se sont sédimentées dans des dépôts vaseux d’un ancien estuaire entre 1 et 0,78 Ma (ce qui correspond à la fin du Pléistocène inférieur). Ces empreintes ont été retrouvées dans un secteur proche de la zone où avaient été découverts les outils taillés (site 3 d’Happisburgh), mais elles ne peuvent toutefois leur être strictement associées.
À la suite du recul des falaises, qui sont constituées de terrains meubles, les empreintes sont apparues à l’air libre sur une surface de 12 mètres carrés. Au total, 152 traces ont été enregistrées. Parmi celles-ci, les empreintes d’hominidés ont pu être ainsi distinguées de celles d’animaux. Mesurant de 30 à 50 millimètres de profondeur, de 140 à 250 millimètres de longueur et de 60 à 110 millimètres de largeur, les traces d’hominidés ont été relevées par photogrammétrie et scannées au laser (modélisation rigoureuse de la géométrie des images et de leur acquisition afin de reconstituer une copie 3D exacte de la réalité). Ces enregistrements ont permis ensuite de travailler en détail sur une douzaine de ces traces les mieux conservées.
Les différences de taille des empreintes ont permis de penser que celles-ci appartiennent à au moins cinq individus. Les traces des gros orteils sont visibles sur certaines d’entre elles et permettent d’avoir une idée du mouvement et de la direction des pistes qui sont orientées préférentiellement vers le sud.
La stature et la masse corporelle des individus ont pu être estimées en tenant compte de la difficulté à progresser dans ces sédiments vaseux. La taille varie de 1 mètre à 1,73 mètre et le poids de 48 à 53 kilogrammes. Les statures comprises entre 1,60 et 1,73 mètre sont considérées comme appartenant à des adultes. Les autres sont attribuées à des jeunes. L’individu le plus grand (1,73 m) pourrait être un mâle. Ces valeurs rentrent dans la variabilité des statures des Homo antecessor mais également d’Homoheidelbergensisetde l’homme de Néandertal. La taille des traces en revanche correspond à ce qui a été estimé pour Homo antecessor. Les traces sont plus larges que celles d’Homo erectus ou de Paranthropusboisei. Elles seraient donc vraisemblablement dues à Homo antecessor. L’étude des sédiments permet de dire que ces individus progressaient dans un paysage semi-forestier constitué de pins, de bouleaux, d’aulnes et de prairies typiques d’une période interglaciaire sous un climat tempéré. Rappelons qu’à cette période la Grande-Bretagne était reliée à l’Europe continentale (la mer du Nord sera mise en place vers 400 000 ans) et que la zone d’Happisburgh correspondait à un large estuaire situé loin des côtes.
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Écrit par
- Marie-Hélène MONCEL : directeur de recherche au CNRS
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Médias