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TRADUCTION

Théorie de la traduction

Tout au long de l'histoire, la réflexion sur la traduction a été centrée sur des oppositions binaires : langue source/langue cible ; texte original/texte traduit ; littéralisme/traduction libre ; traduction de la lettre/traduction de l'esprit. Ces polarités ne sont pas du même ordre. On constate cependant, dans les débats, des recouvrements. Quel que soit l'objet de la divergence, un phénomène reste central : l'orientation vers le texte source ou vers le texte traduit. La réflexion en termes d'oppositions n'est pas le seul fait de positions individuelles. Le courant privilégié a varié selon les époques et selon les contextes socioculturels. On peut cependant se demander pourquoi les problèmes se sont posés en ces termes. Tout d'abord, les principes théoriques avancés ont été presque systématiquement liés, tout au moins avant le xxe siècle, à une pratique dont on justifiait les choix a posteriori. Ceux-ci étaient érigés en théorie et entraînaient, de ce fait, le rejet de la position inverse. Les phénomènes externes, qu'ils soient culturels, sociaux ou politiques, ont largement orienté les positions individuelles. Il reste néanmoins qu'une réflexion de ce type est fondée en dernier ressort sur un jugement de valeur et ne peut donc aboutir à une issue définitive. Autre fait caractéristique, la réflexion sur la traduction, antérieure au xxe siècle, est fondée presque exclusivement d'une part sur la traduction de la Bible, d'autre part sur la traduction littéraire et plus particulièrement la poésie. Cette restriction à deux catégories de textes a également joué un rôle dans la récurrence de la problématique posée. Si le débat central apparaît comme une constante, les motivations qui sous-tendent chacune des polarités subissent en revanche des variations.

L'orientation vers la langue source a été déterminée, en ce qui concerne la traduction de la Bible, par le souci de ne pas trahir la parole divine. D'où un respect de la forme qui allait souvent jusqu'au littéralisme. On peut citer, dans cette mouvance, les traductions bibliques de l'Antiquité, la Revised Version de la Bible (1881-1885) en Angleterre, la American Standard Version (1901) ou encore les traductions contemporaines d'André Chouraqui. Le mot à mot a alors comme origine le respect religieux.

Que ce soit au niveau des mots ou des structures syntaxiques, la valorisation du texte source n'a cependant pas toujours pris la forme du littéralisme. La devise célèbre de Cicéron, « traduire sens pour sens, et non mot à mot », a tantôt été reprise par les partisans du texte original, tantôt par les partisans du texte traduit. Dans la mesure où ce qu'on entendait par « reproduire le sens » n'a été exprimé jusqu'au xxe siècle qu'en termes très généraux, il est difficile de juger quelle était la teneur exacte de ces propos. On constate cependant que, en dépit d'exceptions, la réflexion, qui, dans un premier temps, était axée sur les mots, s'est peu à peu tournée vers la traduction d'unités plus larges. Le romantisme allemand nous fournit un autre exemple de valorisation du texte original. Il s'agit dans ce cas de ressourcer sa propre langue et d'enrichir sa littérature par le biais de l'œuvre originale afin d'atteindre l'universel.

Le fait de privilégier le texte traduit a, de la même façon, été lié à des préoccupations diverses. Lorsque Cicéron préconise la « latinisation » des textes grecs, on peut y déceler un motif à la fois politique et culturel : le besoin d'affirmer la suprématie romaine. On ne peut pour autant nier la conscience aiguë qu'il avait de l'hétérogénéité des langues sur le plan linguistique. Au Moyen Âge, en revanche, où la notion de propriété littéraire n'était[...]

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Pierre de Rosette

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