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TRAITÉ D'ATHÉOLOGIE (M. Onfray) Fiche de lecture

Le lecteur qui entreprendra la lecture du livre de Michel Onfray en se fiant à son titre, Traité d'athéologie (Grasset, 2005), ne trouvera d'un « traité » guère de traces, mais si c'est un pamphlet antimonothéiste qu'il cherchait, alors ses vœux seront comblés… La froideur du titre ne doit pas tromper, en effet, sur la violence antireligieuse qui se déchaîne dans cet ouvrage. Mais si le pamphlet est vigoureux, et parfois réjouissant dans sa vigueur même, le malaise saisit vite le lecteur : Onfray se veut tout autant philosophe que pamphlétaire, mais il est très loin de réussir cette union si délicate qui fait l'originalité de l'Antéchrist de Nietzsche, modèle plus ou moins avoué de notre auteur. Nietzsche pamphlétaire irrigue constamment l'analyse historique du christianisme de sa pensée propre sur la volonté de puissance. Onfray, de façon plus raide, présente dans deux premières parties (« Athéologie » et « Monothéismes ») les bases philosophiques de la critique du monothéisme, et étudie dans les deux parties suivantes (« Christianisme » et « Théocratie ») les problématiques historiques de l'élaboration du christianisme, de son lien avec le pouvoir et de l'unité profonde des trois grands monothéismes, qui partagent tous, selon lui, les mêmes haines fondamentales : de la vie, du corps, de la sexualité, de la femme, de la science, de la démocratie, etc.

Une phrase résume clairement cette position : « La religion procède de la pulsion de mort. » Pourquoi, a-t-on envie de demander, la « religion », alors que toute l'analyse porte sur le monothéisme ? Une réflexion sur les caractéristiques du polythéisme est fâcheusement absente de l'ouvrage. Mais, surtout : peut-on réduire le monothéisme à un seul versant de la pulsion ? L'ouvrage tient tout entier dans cette réduction. C'est, si l'on veut, sa « thèse » philosophique, mais qui, par son simplisme, affaiblit l'enjeu polémique, lequel n'est pas sans intérêt, puisqu'il s'appuie sur une lecture de notre époque qui ne se réduit pas aux aspects les plus visibles du religieux.

Cette lecture offre le meilleur de l'ouvrage : inviter à une double vigilance. Onfray défend certes la raison, la liberté de pensée, la démocratie contre les fondamentalismes. Mais ce « retour » trop visible du religieux ne doit pas masquer le caractère véritable de l'époque, son nihilisme : « Le nihilisme provient de ces turbulences enregistrées dans la zone de passage entre le judéo-chrétien encore très présent et le post-postchrétien qui pointe modestement, le tout dans une ambiance où s'entrecroisent l'absence des dieux, leur présence, leur prolifération, leur multiplicité fantasque et leur extravagance. » Pour Onfray, l'obstacle à l'athéisme véritable qu'il appelle de ses vœux est moins dans l'irrationalisme pur ou dans le fondamentalisme radical, tous deux repérables, que dans la persistance, sous le masque laïque, du religieux : « La mise à plat laïque et philosophique des valeurs de la Bible et leur conservation, puis leur usage, ne suffisent pas à produire une éthique postchrétienne. » Voilà, en somme, ce qui doit animer la véritable vigilance : débusquer les relents encore sensibles de la décomposition de Dieu.

C'est, hélas ! ce que l'ouvrage développe le moins, se contentant de mentionner rapidement les effets du « judéo-christianisme » dans le droit ou la santé. Le « véritable athéisme » dont l'auteur souhaite l'avènement reste une coquille vide. L'analyse historique, quant à elle, porte essentiellement sur des aspects soit bien connus (la théocratie du Bas-Empire) soit très douteux (Onfray exagère considérablement et surtout interprète mal la « fascination »[...]

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Écrit par

  • : agrégé de philosophie, psychologue au centre médico-psychologique de Villeneuve-Saint-Georges

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