TRAUMATISME PSYCHIQUE
De nouveaux champs d'études
Les observations des psychiatres faites pendant la Seconde Guerre mondiale vont bouleverser les conceptions, notamment à cause des troubles aigus immédiats. Le souci principal sera alors de deux ordres : préserver les effectifs pour l'armée (réduire au maximum les « pertes psychiatriques ») et élargir la question du trauma aux populations civiles.
Les camps de concentration furent un tel traumatisme qu'il était urgent de prendre en compte les conséquences de la guerre pour les civils. À partir des années 1970, d'autres événements comme le terrorisme, les prises d'otages, la torture dans les régimes politiques de dictature, les accidents, les agressions, les viols, les exodes massifs de réfugiés et les catastrophes naturelles ont suscité beaucoup d'études. Celles-ci se sont aussi élargies au traumatisme chez l'enfant, jusque-là négligé sous prétexte qu'il serait « trop petit pour comprendre ».
Psychiatre des armées, Crocq s'est inspiré de sa pratique clinique et a insisté sur les différentes formes de névroses issues de traumatismes violents (névroses de guerre, névroses de guérilla et névroses de captivité ou de la déportation). D'après lui, personne ne peut sortir indemne de ce type de traumatisme. Aussi est-il important d'avoir la possibilité soit d'agir ou de verbaliser au moment du trauma, soit d'« abréagir » immédiatement après (debriefing). Cela agirait comme une protection contre l'installation d'une névrose ultérieure.
Claude Barrois développera une perspective qualitative en introduisant les notions de non-sens, néant, rupture de lien social, confrontation avec l'impensable de la mort. Selon lui, le traumatisme est la chute dans un abîme. L'effroi domine, qui est vécu comme expérience de solitude absolue, rupture de tous les liens culturels et communautaires de la personne et expérience de la « perte de soi-même en totalité ». Le cauchemar serait la démonstration de l'absence d'intervention du refoulement et son caractère hallucinatoire engendrerait un mécanisme de rejet, parce que trop insupportable. Le syndrome de répétition est alors inévitable, car toute chose exclue est destinée à revenir sans cesse.
L'histoire du trauma est parsemée de guerres, de catastrophes ; elle est intimement liée à l'homme et à son inscription dans la vie. Pour ceux qui ont vécu cette proximité avec la mort, ce retour à la vie est parfois très long. Tenter de comprendre le trauma, c'est vouloir comprendre l'être humain dans son intimité émotionnelle et dans son rapport à l'inconnu. C'est aller au plus profond du ressenti pour tenter d'éclairer la part d'ombre commune à chacun : la mort.
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Écrit par
- Hélène THOMAS : psychologue clinicienne
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