TRENTE (CONCILE DE)
Les réformes disciplinaires
Au long des sessions, le concile mena de front la clarification doctrinale et la réforme de l'Église. Le point de départ de celle-ci fut, dès la Ve session, le décret sur la prédication. Donnant implicitement raison à Luther, qui, dans un sermon de 1512, avait protesté contre « le silence organisé sur la parole de Dieu ou son adultération », les pères demandèrent au clergé séculier, à tous les échelons, de « prêcher le saint Évangile de Jésus-Christ ». « Si quelqu'un méprise cette obligation, qu'il soit soumis à un châtiment rigoureux. » Seul un corps pastoral rénové pouvait efficacement délivrer aux fidèles le message sacré. S'ensuivirent une série de décisions concernant la réforme du clergé de haut en bas – décisions qui étaient souvent la remise en vigueur de constitutions antérieures non appliquées. Le concile supplia la papauté de s'entourer de cardinaux « de choix », de « placer à la tête des Églises des évêques souverainement bons et compétents », interdit le cumul des bénéfices, décida que les sujets promus à une église cathédrale devraient se faire consacrer évêques dans les trois mois, affirma l'obligation de la résidence contre ceux qui « font toute l'occupation de leur vie d'être continuellement errants et vagabonds en divers cours, ou plongés dans le souci des affaires temporelles ». Il rappela aux évêques qu'ils devaient assister tous les trois ans à un synode provincial, tenir tous les ans un synode diocésain et enfin visiter régulièrement leur diocèse.
Contrairement à toute attente, l'autorité pontificale sortit renforcée de l'épreuve tridentine. Sur le plan local, il en alla de même de celle de l' évêque. À la fin du Moyen Âge, celui-ci devait s'incliner non seulement devant le patronage des laïcs ou des monastères, mais aussi devant les vacances en cour de Rome, les mandats apostoliques, les droits de prévention et de dévolution, les grâces expectatives, etc. Il se heurtait aux exemptions des religieux, des chapitres, des archiprêtres, sans parler de l'« appel comme d'abus ». Le concile voulut donc restaurer le pouvoir de l'évêque, qui fut désormais considéré dans son diocèse comme le « délégué du Siège apostolique » – qualité qui devait lui permettre, du moins en théorie, de triompher des exemptions, y compris l'exemption monastique, la mieux protégée de toutes.
L'autorité est ainsi restituée à l'épiscopat afin qu'il puisse reprendre en main un clergé souvent défaillant. On fait alors une obligation à l'évêque de visiter les paroisses de son diocèse et d'y vérifier la résidence des curés. Il est désormais interdit à ceux-ci de s'absenter sans la permission de l'ordinaire. La hiérarchie suspendra les clercs ne portant pas soutane, veillera à l'honnêteté de vie des hommes d'Église, punira les prêtres concubinaires, bannira du culte l'« avarice », l'« irrévérence » et la « superstition », éloignera de l'autel les prêtres « vagabonds et inconnus », ne conférera sacerdoce et charge d'âmes qu'à des ordinands éprouvés. La XXIIIe session qui donna ces directives est surtout célèbre pour avoir décidé la création des séminaires diocésains, « perpétuelles pépinières de ministres pour le culte de Dieu ». En fait, les séminaires tridentins d'Italie (à distinguer des séminaires de type français des xviie et xviiie s.) ne donnèrent pas les résultats escomptés parce qu'ils consistaient dans le rassemblement hétéroclite dans un même collège de tous les candidats au sacerdoce depuis l'âge de douze ans jusqu'à l'ordination.
La rénovation catholique ne pouvait s'opérer que si le clergé séculier gagnait en vertu et en science théologique.[...]
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Écrit par
- Jean DELUMEAU : professeur honoraire au Collège de France, membre de l'Institut
Classification
Média
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