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TRÉSORS FATIMIDES DU CAIRE (exposition)

Une exposition entièrement consacrée aux arts de l'Égypte fatimide constitue un événement d'importance : ce fut sans doute la première fois que furent réunis des objets de provenances diverses ayant en commun d'avoir été produits sous le règne des Fatimides (909-1171). Dynastie musulmane shiite et ismaélienne originaire d'Ifrikiya (actuelle Tunisie), les Fatimides se sont implantés en Égypte – où ils fondèrent Le Caire – et en Syrie. Leur domaine, au centre du monde musulman de l'époque, constitue une zone intermédiaire entre l'Orient et l'Occident. De ce fait leurs arts bénéficient d'apports multiples, où se croisent techniques orientales, iconographie chrétienne, matériaux d'Afrique noire ou des Indes, qui se fondent dans le riche substrat d'une Égypte millénaire. Si l'essentiel des objets présentés ont été produits en Égypte et en Syrie, l'art fatimide connaît aussi un rayonnement en Afrique du Nord d'une part (dynasties ziride et hammadide) et d'autre part en Sicile, avec les rois normands.

Malgré sa richesse, l'art fatimide est encore mal connu. Des objets naguère catalogués comme « orientaux » sont maintenant restitués aux Fatimides, alors que des œuvres considérées comme fatimides sont désormais rendues aux Normands de Sicile. L'exposition présentée à l'Institut du monde arabe à Paris, du 28 avril au 30 août 1998, a donc eu le mérite de faire le point sur la question en rassemblant pour la première fois deux cent douze objets provenant aussi bien de trésors d'églises d'Europe, du musée d'Art islamique du Caire, du Metropolitan Museum de New York ou de collections privées permettant ainsi au grand public de découvrir un aspect encore méconnu de l'art islamique.

Prenant le parti d'un arrangement thématique, l'exposition regroupait les pièces suivant une scénographie assez sobre. Au Caire, presque tous les vestiges de palais fatimides ont disparu. Les objets montrés dans le cadre du « Palais » représentaient par conséquent les rares témoins de bâtiments dont des chroniques décrivent le luxe. Quelques panneaux ou frises de bois ont été réutilisés à des époques postérieures, et ont ainsi échappé à la destruction. Il en va de même pour des plaques de marbre sculpté. Une salle était consacrée à la vie de cour, illustrée par quelques objets parmi les plus somptueux : bijoux, métaux, céramiques, ivoires, textiles, sans oublier l'extraordinaire aiguière en cristal de roche taillé, portant le nom du calife al-‘Aziz, conservée de nos jours au Trésor de Saint-Marc de Venise. À ces objets de luxe venaient s'ajouter quelques fragments de manuscrits illustrés, maigres survivants d'un art du livre raffiné.

La salle réservée à la vie religieuse présentait d'une part des œuvres musulmanes –  mihrāb (niche indiquant la direction de La Mecque) de bois incrusté et sculpté, daté de 1145-1146, pages de corans, dont un folio du superbe Coran bleu (Tunisie, début du xe siècle, malheureusement dispersé de nos jours entre différents musées), ou amulettes estampées, d'autre part des objets chrétiens ou juifs, illustrant ainsi la vie des différentes communautés religieuses. Il faut mentionner par exemple les fragments écrits sur parchemin ou sur papier provenant de la célèbre Geniza (dépôt) de la synagogue de Fustat (ou Vieux-Caire), qui renfermait des millions de documents constituant une source importante pour l'histoire de l'époque fatimide. L'art funéraire, quant à lui, était rapidement évoqué par des stèles au sobre décor épigraphique, provenant de Kairouan et d'Égypte.

La vie quotidienne était illustrée par des objets utilitaires ou décoratifs en céramique à décor de lustre métallique, des poteries communes, des métaux, des textiles, des[...]

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Écrit par

  • : docteur en études iraniennes, maître de conférences à l'université de Provence

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