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TRINITÉ

Le IIe siècle

Les penseurs chrétiens de la première moitié du iie siècle ont pour souci commun d'exalter le pouvoir et la dignité du Christ sauveur. Mais les uns voient dans Jésus un homme élevé à la divinité ; on parle, dans ce cas, de christologie «  adoptianiste ». Les autres se réfèrent à l'idée du Christ préexistant, déjà présente chez Paul et dans les écrits johanniques ; c'est ce que l'on appelle la « haute christologie ».

On a un exemple de christologie adoptianiste dans la cinquième parabole du Pasteur d' Hermas. Jésus y apparaît comme un homme qui a reçu l'Esprit de Dieu au baptême, qui lui a été totalement obéissant, et qui a ainsi mérité d'être élevé par Dieu au rang de fils adoptif, à côté de l'Esprit-Saint, fils par nature.

Mais, dès cette époque, la haute christologie est beaucoup mieux représentée. Selon celle-ci, « le Seigneur Christ, qui nous a sauvés, est devenu chair, alors qu'il était d'abord esprit » (Seconde Épître de Clément, ix, 5), c'est-à-dire esprit divin. Depuis qu'il a voulu naître de la Vierge, « il est à la fois charnel et spirituel, engendré et inengendré ; dans l'homme, Dieu ; dans la mort, vie véritable ; à la fois de Marie et de Dieu ; passible et en même temps impassible » (Ignace, Éphésiens, vii, 2). Cette haute christologie devait l'emporter. Elle seule répondait aux aspirations des chrétiens, comme le rappelle le début de la Seconde Épître de Clément : « Frères, il faut que nous pensions de Jésus-Christ ce que nous pensons de Dieu [...]. Car, si nous pensons bassement de lui, nous n'aurons que de petites espérances. »

Ces représentants de la haute christologie ne se soucient guère de la concilier explicitement avec la foi monothéiste qu'ils professent. À la même époque, en revanche, d'autres penseurs résolvent avec audace le problème de la pluralité du divin. Ce sont les gnostiques chrétiens du iie siècle, comme Basilide et Valentin. Plaçant à un niveau assez bas dans l'échelle des êtres le dieu de l'Ancien Testament, créateur maladroit et juge vindicatif, ils posent à l'origine un Dieu inconnaissable, le Dieu-qui-n'est-pas de Basilide, ou l'Abîme de Valentin. Mais ce Dieu ne reste pas dans sa solitude, car il est tout amour, et il n'y a pas d'amour sans objet aimé. C'est ainsi que l'Abîme émet l'Intellect et la Vérité, qui émettent à leur tour le Logos et la Vie, de qui procèdent l'Homme et l'Église, et jusqu'à trente « éons » qui, dans une communion parfaite, constituent le Monde divin, le « plérôme ». Pour la gnose, Dieu ne se caractérise pas par la solitude, mais par l'amour et une fécondité spirituelle lui permettant d'engendrer des êtres qui lui soient consubstantiels.

Mais le dédain des gnostiques pour le commun des fidèles et leur désinvolture à l'égard de la Bible les rejetèrent hors de l'Église. Un rôle décisif revint en revanche à leurs contemporains, les « Apologistes » (Justin, Tatien, Athénagore, Théophile d'Antioche). Soucieux de rendre le christianisme intelligible aux païens cultivés, les Apologistes empruntent au judaïsme alexandrin la théorie du Logos créateur, où des idées platoniciennes et stoïciennes se mêlent à des thèmes bibliques : Dieu a créé le monde par son Logos, qui n'est autre que la Sagesse du livre des Proverbes. Les Apologistes identifient à ce Logos le Christ préexistant.

Pour expliquer comment le Logos est venu à l'existence, les Apologistes recourent à la distinction stoïcienne du logos endiathetos – la pensée immanente – et du logos prophoricos – la parole qui l'exprime au dehors. Dieu, qui « avait son Logos immanent en ses entrailles » (Théophile d'Antioche, À Autolycos, II,[...]

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur à l'Université libre de Bruxelles

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