- 1. Le national-socialisme et la conquête du pouvoir
- 2. Mise en place et consolidation du nouveau régime (1933-1936)
- 3. Réarmement et système d'alliances
- 4. Vers la guerre
- 5. Des victoires éclairs à l'effondrement
- 6. Le système concentrationnaire et l'antisémitisme
- 7. Les résistances
- 8. Jugements et problématique
- 9. Bibliographie
TROISIÈME REICH (1933-1945)
Article modifié le
Vers la guerre
À partir de 1936, la militarisation de l'Allemagne va s'accélérer : tous les jeunes gens sont incorporés dans la Jeunesse hitlérienne (Hitler-Jugend), puis doivent accomplir leur temps dans le Service de travail du Reich (créé le 26 juin 1936). De 100 000 membres en 1932, la Jeunesse hitlérienne est passée à 3,4 millions en 1934, à plus de 8 millions en 1938. Le 24 août 1936, la durée du service militaire avait été portée à deux ans.
Le 5 novembre 1937, Hitler exposa à ses plus proches collaborateurs, Göring, von Neurath (ministre des Affaires étrangères) et les chefs de l'armée de terre et de la marine, ses plans en matière de politique extérieure. Il voulait « conquérir un plus grand espace vital pour le peuple allemand [...] en Europe, dans les territoires limitrophes du Reich ». Cette solution de force serait réalisée au plus tard en 1943-1945, dès 1938 si les circonstances s'y prêtaient. Les premiers pays menacés étaient désignés : la Tchécoslovaquie et l'Autriche.
Ces projets ne se heurtèrent à des objections de principe ni de la part des milieux industriels – premiers bénéficiaires du réarmement qui accroissait leur puissance et leurs profits – ni de la part des chefs militaires. Cependant, von Blomberg (ministre de la Guerre) et von Fritsch (commandant en chef de l'armée de terre) craignaient que la hâte de Hitler à les réaliser n'en compromît le succès. Ils supputaient la réaction des puissances étrangères et suggéraient une plus grande prudence. Irrité de ce qu'il prenait pour des hésitations ou des atermoiements, Hitler, par des intrigues subalternes, se débarrassa des deux généraux et les remplaça par des militaires plus dociles (Wilhelm von Keitel, Walther von Brauchitsch).
Dans d'autres secteurs aussi, la préparation de la guerre de conquête entraîna des modifications. Von Neurath fut remplacé à la tête de la diplomatie du Reich par un national-socialiste bon teint : Joachim von Ribbentrop, tandis que le chef des S.S., Heinrich Himmler, voyait croître ses pouvoirs. Une ordonnance du 17 juin 1936 avait placé toutes les polices sous son autorité. Le 27 septembre 1937 était créé le Service central de sécurité du Reich (Reichssicherheitshauptamt, R.S.H.A.), qui centralisait tout l'appareil de répression et en confiait la direction à Himmler et aux S.S.
L'Anschluss
Les puissances de l'Entente s'étaient opposées, après 1918, au rattachement de l'Autriche à l'Allemagne. Dès son arrivée au pouvoir, Hitler songea à réaliser l'opération. Comme l'Italie et les puissances occidentales adoptèrent une attitude sans équivoque, une première tentative des nationaux-socialistes autrichiens de s'emparer du pouvoir échoua en juillet 1934, et n'aboutit qu'à l'assassinat du chancelier Dollfuss. En juillet 1936, Allemagne et Autriche signèrent un traité de non-ingérence que les fascistes allemands n'étaient nullement décidés à respecter. L'amélioration des relations germano-italiennes créa une situation nouvelle dans le bassin danubien où Hitler avait désormais les mains libres. Convoqués en Allemagne, à l'Obersalzberg, en février 1938, le chancelier Schuschnigg se vit imposer un véritable diktat et capitula. Comme il faisait mine de résister une fois rentré à Vienne, les troupes allemandes envahirent l'Autriche dans la nuit du 11 au 12 mars. Le 13, Hitler proclamait l'annexion de l'Autriche. La France et l'Angleterre se bornèrent à une protestation verbale.
Munich
Encouragé par ce succès, Hitler ne tarda pas à s'en prendre à la Tchécoslovaquie. Le 30 mai 1938, une instruction secrète à la Wehrmacht prévoyait « le démembrement de ce pays dans un proche avenir par une action militaire ». Le prétexte fut fourni par l'agitation de la minorité sudète. L'Angleterre ayant conseillé à Prague de faire droit aux revendications des Sudètes, tout dépendait de l'attitude de la France, liée à la Tchécoslovaquie par un traité signé en 1935. Au cours de deux rencontres du Premier ministre britannique, Neville Chamberlain, avec Hitler, en septembre, celui-ci constata que les milieux dirigeants anglais acceptaient ses revendications initiales : il les accrut aussitôt et, quelques jours plus tard, à Munich, les représentants de l'Italie, de la France et de l'Angleterre rencontraient le chef du IIIe Reich et faisaient droit à ses nouvelles demandes, sans que la principale intéressée, la Tchécoslovaquie, eût même été consultée. Dans les jours qui suivirent, la région des Sudètes était incorporée au Reich.
Bien que Hitler eût déclaré solennellement en septembre 1938 « qu'il ne voulait pas de Tchèques », le IIIe Reich, le 16 mars 1939, annexe le territoire tchèque après avoir incité la Slovaquie à se proclamer indépendante. La Tchécoslovaquie était rayée de la carte.
Ces annexions mettent en lumière les méthodes diplomatiques du IIIe Reich. Faisant alterner les protestations pacifiques et les menaces, violant sans le moindre scrupule les accords qu'il venait de signer, Hitler s'efforce par tous les moyens de neutraliser ses adversaires en les isolant. Ces conquêtes territoriales réalisées sans guerre accrurent, en 1938, le prestige de Hitler et permirent à la propagande de Goebbels de développer le « culte du Führer » en même temps qu'il exaltait le nationalisme et le chauvinisme, et que, dans tous les domaines, était accélérée la préparation à la guerre.
Une fois la Tchécoslovaquie dépecée, Hitler se tourna vers la Pologne.
La France et l'Angleterre entrèrent en pourparlers avec l'Union soviétique, la participation de celle-ci étant indispensable au maintien de la paix en Europe orientale. Mais la France et surtout l'Angleterre se refusaient à négocier avec l'Union soviétique des conventions militaires sans lesquelles tout accord politique demeurait inefficace. C'est alors que Hitler pressa Staline de recevoir von Ribbentrop. En quelques heures fut signé entre l'Allemagne et l'Union soviétique un pacte de non-agression en contradiction flagrante avec l'antibolchevisme virulent jusqu'alors affiché par le national-socialisme. L'Union soviétique avait voulu écarter la menace d'un front commun des puissances occidentales contre elle, menace qui avait semblé prendre corps au lendemain de Munich.
Le 1er septembre, les forces armées allemandes envahirent la Pologne sans déclaration de guerre. Le 3, la France et l'Angleterre déclaraient la guerre à l'Allemagne.
La guerre et d'abord sa préparation entraînèrent dans le Reich un certain nombre de changements de structure. Sur le plan économique, on procéda à une concentration et à une rationalisation beaucoup plus poussées. Chaque secteur de production fut strictement organisé. On créa, à la fin de 1941 et au début de 1942, cinq Unions industrielles (Reichsvereinigungen) à la tête desquelles furent placés des représentants des grandes firmes (Flick, Mannesmann, Krupp). Ces Reichsvereinigungen, dominés par quelques grands monopoles, avaient pouvoir, par exemple, de faire fermer les petites entreprises déclarées peu rentables ou ne travaillant pas directement pour la guerre. Ces Unions étaient dotées de grands pouvoirs et fonctionnaient parallèlement à un Conseil de l'armement (Rüstungsrat) dans lequel étaient également représentés les grands industriels.
À ce stade on peut considérer que les cadres supérieurs du Parti national-socialiste ont, dans ces domaines, largement fusionné avec l'appareil de direction capitaliste traditionnel. Cela est attesté par la création des usines Hermann Göring. Des hommes comme Fritz Todt ou Albert Speer, chargés d'organiser sur le plan économique une certaine planification en vue de la « guerre totale », accentuent cette évolution qui débouche sur un système que les historiens marxistes dénomment « capitalisme monopoliste d'État ».
En même temps, le pillage des territoires occupés par la Wehrmacht se faisait plus systématique, les grands consortiums allemands s'assurant, à la faveur de la guerre, la direction des principales firmes dans ces territoires. Pour la France, le total des spoliations a été évalué à 659 milliards de francs 1938. Au procès de Nuremberg, on a estimé que, de juin 1941 à mars 1944, 9 200 000 tonnes de blé, 622 000 tonnes de viande avaient été expédiées des territoires soviétiques occupés vers le Reich.
S'il hésita à lever des troupes auxiliaires dans les pays occupés, le Reich transféra de ces pays en Allemagne de grandes quantités de main-d'œuvre (Service du travail obligatoire). À ces 7 millions de travailleurs forcés, il faut ajouter 4 millions de prisonniers de guerre et une partie des déportés : on aboutit, vers la fin de la guerre, à un total de 20 millions d'étrangers contraints de participer directement, en Allemagne même, à l'effort de guerre du Reich.
Ce pillage et ces déportations, les souffrances de la guerre accroissaient les résistances. Pour les briser, Himmler fut doté de pouvoirs plus étendus encore. En 1943, il remplaça Frick au poste de ministre de l'Intérieur et ne cessa d'augmenter les effectifs de la police, des S.S. et des Waffen-S.S. placés sous ses ordres. Après le 20 juillet 1944, il assuma en outre les fonctions de commandant en chef de l'armée de l'intérieur.
Accédez à l'intégralité de nos articles
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Gilbert BADIA : chargé d'enseignement à l'université de Paris-VIII
Classification
Médias
Autres références
-
ACCESSION D'HITLER AU POUVOIR
- Écrit par Sylvain VENAYRE
- 209 mots
- 1 média
Le 30 janvier 1933, Adolf Hitler est nommé chancelier, dans la légalité républicaine définie par la Constitution de Weimar. À ce moment-là, son parti, le Parti ouvrier allemand national-socialiste (N.S.D.A.P.) ou Parti « nazi » qui veut tenter, après Mussolini, une synthèse du nationalisme...
-
ABETZ OTTO (1903-1958)
- Écrit par Jean BÉRENGER
- 332 mots
Important dignitaire nazi, artisan dès avant 1933 d'une réconciliation franco-allemande en particulier avec Jean Luchaire et Fernand de Brinon, Otto Abetz eut pour rôle essentiel d'occuper, de 1940 à 1944, le poste d'ambassadeur d'Allemagne à Paris. Sa mission avait un double caractère qui dépassait...
-
ACCORDS DE MUNICH
- Écrit par Sylvain VENAYRE
- 214 mots
- 1 média
Fidèle à son pangermanisme proclamé, Adolf Hitler réclame avec plus d'insistance que jamais, en septembre 1938, la cession au IIIe Reich du territoire tchécoslovaque sur lequel vit la minorité germanophone des Sudètes. L'Allemagne est prête à la guerre pour obtenir gain de cause....
-
ALLEMAGNE (Histoire) - Allemagne moderne et contemporaine
- Écrit par Michel EUDE et Alfred GROSSER
- 26 892 mots
- 39 médias
La défaite de 1918 marque non seulement Weimar, mais le IIIe Reich, qui est essentiellement une protestation contre les conditions imposées par les vainqueurs. S'il y a un sentiment qui puisse faire la quasi-unanimité des Allemands, c'est bien le refus du Diktat de Versailles, des clauses... -
ANGLETERRE BATAILLE D' (1940)
- Écrit par Paul VILLATOUX
- 232 mots
- 1 média
Premier engagement purement aérien de l'histoire, la bataille d'Angleterre débute le 10 juillet 1940. Après la « bataille de la Manche », achevée le 7 août, la Luftwaffe lance le 13 août, « jour de l'Aigle », un plan d'attaque destiné à clouer au sol la chasse britannique puis à désorganiser l'économie...
- Afficher les 141 références
Voir aussi
- WEIMAR RÉPUBLIQUE DE (1919-1933)
- HINDENBURG PAUL VON BENECKENDORFF et VON (1847-1934) maréchal allemand
- REICHSWEHR
- RÉPARATIONS LES
- CONCENTRATION CAMPS DE
- GESTAPO (Geheime Staatspolizei)
- SS (Schutzstaffel)
- WEHRMACHT
- RÉSISTANCE EN EUROPE (1940-1945)
- SUDÈTES
- LONGS COUTEAUX NUIT DES (1934)
- HIMMLER HEINRICH (1900-1945)
- SA (Sturmabteilung)
- PAPEN FRANZ VON (1879-1969)
- RÖHM ERNST (1887-1934)
- RÉSISTANCE INTÉRIEURE ALLEMANDE
- RÉARMEMENT
- TRAVAIL FORCÉ
- IG FARBEN (Interessen Gemeinschaft Farbenindustrie)
- SCHACHT HJALMAR (1877-1970)
- ROYAUME-UNI, histoire, de 1914 à 1945
- BLOMBERG WERNER baron von (1878-1946)
- NSDAP (Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei) ou PARTI NATIONAL-SOCIALISTE DES TRAVAILLEURS ALLEMANDS
- REICHSTAG INCENDIE DU
- HEYDRICH REINHARD (1904-1942)
- AUTRICHE, histoire jusqu'en 1945
- NEURATH KONSTANTIN baron von (1873-1956)
- THÄLMANN ERNST (1886-1944)
- SPEER ALBERT (1905-1981)
- RIBBENTROP JOACHIM VON (1893-1946)
- SOLUTION FINALE
- THYSSEN LES
- DÖNITZ KARL (1891-1980)
- ESPACE VITAL THÉORIE DE L'
- HUGENBERG ALFRED (1865-1951)
- FRICK WILHELM (1877-1946)
- KAHR GUSTAV VON (1862-1934)
- HITLÉRIENNE ORGANISATIONS DE JEUNESSE (Hitlerjugend)
- KAPOS
- FRITSCH WERNER baron von (1880-1939)
- PARTI UNIQUE
- POLOGNE, histoire, de 1914 à 1945
- GRANDE-BRETAGNE, histoire, de 1914 à 1945
- CHAMBRES À GAZ
- JUIF HISTOIRE DU PEUPLE
- VERSAILLES TRAITÉ DE (28 juin 1919)
- ARYENNE MYTHE DE LA RACE
- ALLEMAGNE, histoire, de 1806 à 1945
- KPD (Kommunistische Partei Deutschlands) ou PARTI COMMUNISTE ALLEMAND (1918-1946)
- URSS, histoire
- ZYKLON B