TROISIÈME RÉPUBLIQUE
Fondée en réaction contre le second Empire, la troisième République, à bien des égards, continue l'Empire de Napoléon III. Comme ce dernier, elle est portée par la vague du progrès scientifique et technique, par l'avènement d'une civilisation industrielle dont les expositions universelles de Paris (1878, 1895, 1900) illustrent la croissance. Jusqu'en 1914, la stabilité du franc favorise l'épargne. L'État et la société empruntent aisément ; la France prête au monde entier. Certes, l'esprit du rentier prédominait sur l'esprit d'entreprise. Le développement industriel aurait pu prendre plus d'ampleur. Pourtant, compte tenu de conditions naturelles peu favorables, la croissance fut honorable : entre 1869 et 1913, la production passe de 13 à 41 millions de tonnes pour la houille et de 1 à 5 millions pour l'acier. Des Français comptent parmi les pionniers de l'automobile, de l'avion, de la radio. Et la France pouvait alors se nourrir des produits de son sol. Dirigée par une bourgeoisie sans cesse plus nombreuse, appuyée sur la paysannerie, la République avait adopté le parlementarisme libéral et le suffrage universel, garantissant les droits de l'individu. La diffusion de l'instruction était un facteur de promotion sociale et cimentait l'unité nationale.
Mutilée dans son territoire en raison de sa défaite de 1871, la France assuma sous la troisième République un effort militaire sans précédent ; son armée était presque l'égale de celle de l'Allemagne pourtant plus peuplée et économiquement plus puissante. Après 1890, l'alliance russe parut assurer la paix en établissant l'équilibre des forces. À partir des bases constituées par les régimes précédents, un empire colonial s'édifiait en Afrique et en Asie. On mesure après sa disparition quelle influence il a assuré à la langue et à la civilisation françaises.
Néanmoins, dès 1871, des symptômes de faiblesse étaient perceptibles, auxquels l'opinion prêta trop peu d'attention. La faiblesse démographique d'abord. La France, au cours de son histoire, s'était imposée par le prestige de sa civilisation, par sa cohésion, mais aussi par le chiffre de sa population. Au xixe siècle s'amorça une baisse croissante de la natalité qui contrastait avec l'élan démographique des autres nations de l'Europe. Sa paysannerie occupait trop d'hommes pour les quantités produites. Aussi leur niveau de vie devait-il stagner, puis diminuer. L'enseignement technique et professionnel était loin de faire face aux besoins. Alors que le développement de la grande industrie changeait la condition ouvrière, le retard de la législation sociale devenait anormal. La France, au début du xxe siècle, maintenait trop d'aspects archaïques.
La Première Guerre mondiale démontra la force de cohésion qui unissait les Français. Cette force leur permit de sauver leur existence nationale et de reprendre l'Alsace et la Lorraine annexées lors du conflit précédent. Malgré des sacrifices démesurés, la France n'avait vaincu qu'avec l'aide de ses alliés. Seule, elle ne pouvait plus espérer contenir l'Allemagne. Il lui fallut conserver à tout prix dans la paix l'alliance pourtant insuffisante de la Grande-Bretagne.
Ayant perdu au cours de la guerre à peu près deux millions d'habitants, la France ne comptait en 1921 que trente-neuf millions d'âmes, soit un million de plus qu'en 1866. En 1938, sa population atteindra quarante-deux millions, faible gain dû beaucoup plus à l'immigration massive qu'au recul de la mortalité. La richesse acquise des Français avait disparu au cours de la guerre. L'inflation amenuisait la valeur du franc, mais permit une reconstruction rapide des régions dévastées, la modernisation de l'industrie (automobile,[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Louis GIRARD : professeur à l'université de Paris-IV
Classification
Médias
Autres références
-
PROCLAMATION DE LA IIIe RÉPUBLIQUE
- Écrit par Sylvain VENAYRE
- 191 mots
- 1 média
Le 2 septembre 1870, à Sedan, la défaite des armées françaises face aux armées prussiennes sonne le glas du second Empire. Deux jours plus tard, la IIIe République est proclamée à Paris et un gouvernement provisoire est mis en place. La volonté des républicains de continuer la guerre...
-
ACTION FRANÇAISE
- Écrit par Encyclopædia Universalis et Jean TOUCHARD
- 5 156 mots
- 2 médias
L'Action française est née de l'affaire Dreyfus dans une France divisée en deux camps irréconciliables, dans un pays profondément meurtri par l'annexion de l'Alsace-Lorraine et récemment humilié par les événements de Fachoda, dans une atmosphère d'angoisse, de crise et de guerre civile. Jusqu'à sa mort,... -
ANTISÉMITISME
- Écrit par Esther BENBASSA
- 12 229 mots
- 9 médias
...Révolution, le persécuteur du clergé, le fossoyeur de la religion et de la civilisation chrétiennes (accusations réactivées lors de la révolution russe). L'antijudaïsme religieux du xixe siècle est donc nettement contre-révolutionnaire, associé au clan « ultra ». Il est plus virulent que jamais sous... -
ASSOCIATION
- Écrit par Jean-Marie GARRIGOU-LAGRANGE et Pierre Patrick KALTENBACH
- 7 084 mots
La loi de 1901 était aux origines sans doute davantage une étape de la querelle religieuse qu'un progrès démocratique. Bien peu de Français se souviennent que la loi de 1901 est une loi anticléricale. Elle n'est que partiellement – pour le reste ou pour solde, si l'on veut – une loi de liberté... -
ASSOCIATION (sociologie)
- Écrit par Matthieu HELY
- 2 146 mots
Dans la France de la IIIe République, les institutions religieuses et en particulier celles de la foi catholique constituent un véritable « État dans l’État ». L’affirmation de l’État républicain va ainsi passer par une remise en cause des établissements publics du culte et des congrégations religieuses.... - Afficher les 153 références