TRÔNE
Fauteuil sur lequel le souverain s'assied lors des grandes cérémonies, le trône s'insère en général dans un décor destiné à mettre un homme au-dessus du commun des mortels : les trônes sassanides et byzantins plaçaient le souverain au milieu du cosmos, à mi-chemin entre ciel et terre, position souvent suggérée depuis l'Antiquité par des fauteuils ornés de représentations d'animaux, souvent des oiseaux. Symbole du pouvoir, le trône est à l'origine d'expressions du genre « le trône et l'autel », « l'héritier du trône », « le discours du trône »... Clotaire II fit exécuter un trône d'or et de pierres précieuses par saint Éloi. C'est à la fin du viiie siècle qu'aurait été fait en bronze doré un trône inspiré d'une chaise curule romaine telle qu'on peut en voir sur les diptyques consulaires avec des léopards ou panthères : pour les uns, le trône fut fondu à Saint-Denis et pour d'autres à Aix-la-Chapelle, d'où il aurait été apporté à Saint-Denis par la suite (876 avec Charles II le Chauve ou 978 avec le roi Lothaire). L'empereur Lothaire en son Psautier est représenté sur un trône analogue, encore qu'on ne sache pas si le trône de Saint-Denis fut exécuté pour un abbé, pour un évêque ou pour un souverain. Sur leur sceau, des rois capétiens sont représentés assis en majesté sur un trône similaire dès 1076/1080. Suger dans son De administratione déclare qu'il a fait restaurer ce trône, qu'il attribue à Dagobert, et s'en glorifie ; c'est sur ce siège que les rois de France à leur avènement auraient reçu les premiers hommages des grands. Représenté par Montfaucon dans ses Monumens de la monarchie françoise (1729), le trône « de Dagobert » fut transporté au cabinet des médailles en 1791 et servit, mal restauré, à Napoléon Ier quand il distribua les croix de la Légion d'honneur au camp de Boulogne (1804). Depuis cette époque, il est toujours à la Bibliothèque nationale, et on en a fait une réplique pour la basilique de Saint-Denis au xixe siècle. À Reims, il ne semble pas qu'il y ait eu de siège traditionnel pour le sacre : les comptes montrent qu'on fabriquait un fauteuil fleurdelisé assez simple pour être placé en haut de l'échafaud : ce meuble était même bas de dossier pour que le roi puisse être facilement vu du fond de la cathédrale. Dans la grand-chambre ou chambre dorée du parlement de Paris, le trône, toujours aussi simple et totalement intégré au décor fleurdelisé des murs et des marches, était placé dans un coin, de façon que le roi soit à dextre (c'est-à-dire à gauche quand on regarde la scène) d'une composition centrée sur le Christ en croix (Retable du parlement, Louvre) ; un dais surplombait le siège royal, comme un ciel ou un abrégé de l'univers. Le plus fastueux trône de l'Ancien Régime fut celui de huit pieds (2,60 m environ) en argent massif que Louis XIV plaça dans le salon d'Apollon à Versailles, sur une estrade couverte d'un tapis de Perse à fond d'or. C'est là que le Roi-Soleil recevait les ambassadeurs, ou le doge de Gênes venant présenter les excuses de sa république, mais les malheurs des temps firent qu'il fut fondu à la Monnaie avec de nombreux autres objets d'argent qui ornaient le château (1689) ; un trône plus modeste le remplaça. La Révolution fit disparaître des trônes que l'on entrevoyait sur les tableaux de prestige des Bourbons. Napoléon Ier renoua avec la tradition dès les réceptions aux Tuileries et la distribution de la Légion d'honneur aux Invalides (1804). Il existe de bonnes reproductions des divers trônes pour le sacre et les palais : le grand trône de Notre-Dame de Paris avait un dos largement circulaire, car il était plaqué contre le fond de l'église, près du porche[...]
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Écrit par
- Hervé PINOTEAU : vice-président de l'Académie internationale d'héraldique
Classification
Autres références
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AFRIQUE NOIRE (Arts) - Histoire et traditions
- Écrit par Jean DEVISSE , Encyclopædia Universalis , Francis GEUS , Louis PERROIS et Jean POLET
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