Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

TROUBLES DISSOCIATIFS

Amnésie dissociative

L’amnésie dissociative est caractérisée par une altération de la mémoire autobiographique en l'absence de lésions cérébrales significatives détectables par l’imagerie médicale. Le qualificatif de « dissociative » doit donc ici être compris comme synonyme de « fonctionnelle » même s’il invite à considérer a priori la dissociation comme un élément déterminant de sa physiopathologie.

L’amnésie dissociative affecte essentiellement la mémoire autobiographique, c’est-à-dire la capacité de rappeler des faits concernant soi-même ou de revivre des événements contribuant au sentiment d’identité personnelle. L'amnésie dissociative peut être spécifique à des événements survenus à un moment donné, notamment en cas d’événement potentiellement traumatique, être sélective de certains aspects d’un événement ou, plus rarement, impliquer une perte totale de la mémoire autobiographique. Elle peut parfois être associée à un comportement d’errance, ou « fugue dissociative », généralement accompagnée d’une certaine perplexité, mais sans conscience complète des troubles.

Un épisode d'amnésie dissociative survient généralement de façon soudaine et peut durer quelques minutes, quelques heures ou, plus rarement, des mois ou des années. Il s’agit d’une amnésie rétrograde, c’est-à-dire portant sur des événements survenus antérieurement au début des troubles. La personne est par exemple capable d’apprendre de nouvelles informations sur elle-même ou de conserver le souvenir d’événements nouvellement vécus. De même, le fait qu’une amnésie rétrograde ne suive pas la loi de Ribot – selon laquelle, en cas d'amnésie rétrograde, les souvenirs du passé lointain sont mieux conservés que ceux du passé récent – est fortement évocateur d’amnésie dissociative, ainsi qu’une perte massive associée du sentiment d’identité. Si le contexte d’apparition de l’amnésie rétrograde permet souvent de distinguer amnésie dissociative et amnésie dite « organique », c’est-à-dire imputable à une lésion cérébrale significative, certaines situations se prêtent difficilement à un tel exercice, par exemple à la suite d’un traumatisme crânien mineur dans un contexte d’accident ou d’agression.

Les patients souffrant d'amnésie dissociative ont généralement vécu un événement négatif majeur ou, beaucoup plus fréquemment, la répétition de plusieurs événements négatifs, dont le dernier a entraîné une amnésie dissociative. Celle-ci est ainsi fréquemment associée à des expériences de traumatismes dans l'enfance, et en particulier à des expériences d'abus et de négligence émotionnels. Les personnes peuvent ne pas être conscientes de leur perte de mémoire ou n'en avoir qu'une conscience limitée. Elles peuvent également sous-estimer l'importance de la perte de mémoire concernant un événement ou un moment particulier.

Comme souvent en matière d’épidémiologie psychiatrique, d’importantes différences méthodologiques entre les études publiées ne permettent pas une estimation précise de la prévalence de l'amnésie dissociative. Celle-ci varie entre 0,2 % et 7,3 % en population générale. Cependant, la prévalence du symptôme d'amnésie dissociative dans la population générale est vraisemblablement bien supérieure à celle du trouble d'amnésie dissociative proprement dit. L'amnésie dissociative est souvent diagnostiquée entre vingt et quarante ans et sa prévalence est similaire entre hommes et femmes. Le taux de récurrence du trouble au cours de la vie chez les personnes ayant déjà présenté un épisode d’amnésie dissociative n’est pas non plus connu avec précision, mais vraisemblablement élevé, de l’ordre de 40 %.

Sur le plan physiopathologique, les modèles explicatifs issus des sciences cognitives[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur de psychiatrie à l'université de Paris, chef du service de psychiatrie de l'adulte de l'Hôtel-Dieu, Assistance Publique - Hôpitaux de Paris

Classification

Autres références

  • STRESS AIGU ET TROUBLES PSYCHO-TRAUMATIQUES

    • Écrit par
    • 5 773 mots
    Les troubles dissociatifs de l’identité – on parlait autrefois de personnalités multiples – sont un type très particulier de troubles dissociatifs. Ils sous-tendent qu'une personne a plusieurs identités ou des personnalités distinctes appelées « alters », qui prennent tour à tour le contrôle de son comportement,...