- 1. Qu’est-ce qu’un trou noir ?
- 2. Différents types de trous noirs et processus de formation
- 3. Physique des trous noirs
- 4. Singularités et trous de ver
- 5. Signatures électromagnétiques des trous noirs
- 6. Détection des trous noirs stellaires
- 7. Détection des trous noirs intermédiaires
- 8. Détection des trous noirs géants
- 9. Détection des trous noirs primordiaux
- 10. Collisions de trous noirs et ondes gravitationnelles
- 11. Visualisation numérique des trous noirs
- 12. Imagerie directe d’un trou noir supermassif
- 13. Trous noirs et futur de l’Univers
- 14. Bibliographie
- 15. Sites internet
TROUS NOIRS
Singularités et trous de ver
On appelle « trou noir » non pas l'objet qui se trouve au fond du puits de gravité, mais toute la région d’espace-temps confinée à l'intérieur de l’horizon des événements. Qu'y a-t-il cependant au fond d'un trou noir ? Et quel est le sort ultime de la matière qui y tombe ? La théorie de la relativité générale prédit que dans les configurations les plus simples, par exemple un trou noir statique et sphérique, l'effondrement gravitationnel engendre un nœud qui « étrangle » l'espace-temps. La matière s'accumule irréversiblement et indéfiniment dans ce nœud.
En mathématiques, une valeur infinie apparaissant dans un continuum s'appelle une « singularité ». Mais l'idée de voir de la matière s'entasser dans un point infinitésimal constitue une absurdité pour les physiciens. C'est pourquoi ils étudient des scénarios plus plausibles. On peut supposer, par exemple, qu'au voisinage du nœud, la gravité devient répulsive et permet à la matière de rebondir plutôt que de se comprimer indéfiniment. Ce qui n’était encore dans les années 2000 que pure spéculation a pris plus de consistance avec les calculs effectués dans le cadre de la théorie de la gravitation quantique à boucles – une autre voie d'approche pour unifier la relativité générale et la mécanique quantique, différente de la théorie des cordes. Dans cette théorie, l'espace serait formé de grains minuscules, mais pas infiniment petits, en conséquence de quoi sa courbure ne pourrait pas devenir infiniment grande ; dans un trou noir sphérique, l'écrasement de la matière et de l'espace se heurterait à une valeur finie, quoique très élevée, de la courbure, et s'inverserait pour donner lieu à un rebond.
Quoi qu’il en soit, toutes les étoiles tournent sur elles-mêmes ; comment donc les trous noirs, du moins ceux qui se sont formés à partir d'étoiles effondrées, ne tourneraient-ils pas sur eux-mêmes ? De fait, la relativité générale calcule que l'intérieur d'un trou noir de Kerr n'est pas infiniment étranglé par une singularité ponctuelle, mais abrite une singularité en forme d'anneau couché dans son plan équatorial. Du coup, il existe des trajectoires au sein du trou noir qui peuvent éviter le « crash » soit en survolant l'anneau singulier et en ressortant de l’horizon des événements, soit en passant carrément au milieu en évitant le bord, pour déboucher sur un univers infini, mais interne au trou noir.
L'idée que le fond des trous noirs en rotation n'est pas bouché, mais ouvre des passages vers d’autres régions de l'Univers a engendré la notion fascinante de « trous de ver ». Ces distorsions extrêmes de l'espace-temps pourraient connecter des régions très lointaines de notre Univers, voire, selon d'autres théories, d'autres univers. Les sorties des trous de ver seraient des « fontaines blanches » d'où jaillirait l'énergie engloutie par les trous noirs. Des physiciens ont proposé que le big bang pourrait lui-même être une immense fontaine blanche, reliée à un trou noir colossal d'un autre univers qui aurait déversé une partie de sa matière-énergie dans le nôtre. Notre Univers alimenterait à son tour d'autres « big bang » et d’autres univers avec ses propres trous noirs. De trous noirs en fontaines blanches reliés par des trous de ver, on en viendrait ainsi à considérer des univers en cascade.
Sans aller jusque-là, l’hypothèse des trous de ver traversables fascine les physiciens et, davantage encore, les écrivains de science-fiction, dans la mesure où, du moins selon certains calculs, les trous de ver feraient office de « raccourcis », permettant de voyager d’un bout à l’autre de l’Univers en s’affranchissant des distances normalement impossibles[...]
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Écrit par
- Jean-Pierre LUMINET : directeur de recherche émérite au CNRS, laboratoire d'astrophysique, Marseille
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