- 1. Le concept de turbulence
- 2. Quelques exemples de comportements turbulents
- 3. Propriétés générales de la turbulence établie dans les écoulements de fluides
- 4. Méthodes de description et de modélisation
- 5. La turbulence, les techniques, la nature et la vie
- 6. La turbulence en sciences de la Terre
- 7. La turbulence en astrophysique, la turbulence plasma et les interactions turbulence-rayonnement
- 8. Une rupture épistémologique
- 9. Bibliographie
TURBULENCE
La turbulence en astrophysique, la turbulence plasma et les interactions turbulence-rayonnement
La turbulence joue un rôle très important en astrophysique, mais les types d'instabilités et d'écoulements que l'on y rencontre sont souvent très différents de ceux évoqués jusqu'ici : l'attraction gravitationnelle, les réactions nucléaires, les processus radiatifs et les effets électromagnétiques engendrent des situations excessivement variées. D'après le modèle standard généralement admis, la matière et le rayonnement ont évolué en interaction d'une façon extrêmement complexe depuis le big bang marquant la formation de l'Univers, et se trouvent aujourd'hui sous les formes les plus diverses, du vide presque absolu de l'hydrogène intergalactique aux densités colossales des trous noirs pour la première et des ondes très longues aux rayons X durs et γ pour le second. L'étendue des échelles de temps, espace, vitesse ou température mises en jeu est proprement « astronomique ». Ainsi, les températures rencontrées vont des 2,73 K du rayonnement fossile de l'univers primordial aux 15×106 K du cœur du soleil et même aux plus de 200×106 K de la surface de certaines étoiles ; les vitesses relatives peuvent atteindre 104 à 105 kilomètres par seconde, avec les effets relativistes et de compressibilité que l'on imagine. Dans ces conditions, dresser l'inventaire des états hydrodynamiques de l'astrophysique est irréalisable et serait, d'ailleurs, d'autant plus hasardeux que bien des modèles restent susceptibles d'être remis en question : nous nous bornerons à quelques illustrations du rôle de la turbulence dans différentes branches du domaine, et dans les travaux sur la réalisation de la fusion thermonucléaire.
L'univers primordial, la formation des galaxies, des étoiles et des planètes
D'après le modèle cosmologique standard, matière et rayonnement se découplent dans l'Univers environ un million d'années après le big-bang initial, la température étant tombée à moins de 104 K : les premières galaxies et les premières étoiles peuvent alors à se former. Les radiotélescopes embarqués en ondes millimétriques ou submillimétriques permettent de remonter à cette époque, la température de rayonnement du fond diffus cosmologique ayant été ramenée à 2,73 K environ par l'expansion de l'Univers. Ils détectent des fluctuations de densité de très faible amplitude relative (moins de 10–5) qui semblent réparties de façon uniforme dans tout l'univers. D'après la théorie la plus récente, elles s'expliqueraient par le caractère chaotique de la transition de phase correspondant à l'apparition des premiers nucléons dans la « soupe de quarks » de l'Univers primordial. Les nombres de Reynolds (autant qu'ils puissent être évalués dans ces circonstances) étant alors très petits et l'expansion trop rapide, l'intervention d'une turbulence hydrodynamique dans la génération de ces fluctuations primitives serait donc exclue, contrairement à ce qui a été parfois supposé.
Aucun modèle n'explique encore de façon pleinement satisfaisante le processus du passage de ces très faibles fluctuations relatives aux écarts considérables de densité que l'on observe aujourd'hui dans l'univers à toutes les échelles. L'instabilité gravitationnelle y joue indéniablement un rôle fondamental : comme James Jeans l'a démontré en 1902, un milieu en équilibre sous l'effet des seules forces de pression interne et d'autogravitation devient instable dès que la dimension ou la masse dépassent des valeurs critiques. Les fluctuations initiales de densité croissent alors démesurément et les zones légères s'effondrent sur les plus denses, qui se développent à leurs dépens par [...]
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Écrit par
- Fabien ANSELMET : directeur de recherche au C.N.R.S.
- Michel COANTIC : professeur émérite à l'université de la Méditerranée
- Gérard TAVERA : directeur d'études ESM2
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