TURQUIE
Nom officiel | République de Turquie (TR) |
Chef de l'État et du gouvernement 1 | Recep Tayyip Erdogan (depuis le 28 août 2014)
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Capitale | Ankara |
Langue officielle | Turc |
Unité monétaire | Livre turque (TRY) |
Population (estim.) |
86 187 000 (2024) |
Superficie |
769 604 km²
|
Le temps des coups d'État
Depuis le passage à un système pluraliste, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la vie politique turque connaît une évolution rythmée par des cycles décennaux. Les principales dates en sont : 1950, avec les premières élections libres et l'alternance démocratique ; 1960, avec le coup d'État militaire ; 1971, avec la pression exercée par l'armée, obligeant le gouvernement à démissionner ; enfin, 1980, avec le coup d'État perpétré par les forces armées.
En dépit de ces convulsions périodiques, la Turquie est l'un des très rares pays en voie de développement où une démocratie pluraliste a pu subsister. L'État moderne et le régime républicain, créés par Atatürk en 1923, au lendemain de la victoire des nationalistes turcs contre la Grèce et les alliés qui la soutenaient, se sont révélés suffisamment solides pour survivre aux différentes crises que le pays a connues depuis soixante ans. Cet État a été créé sous la responsabilité des élites bureaucratiques militaires et civiles. Atatürk et ses amis, qui dirigèrent le Mouvement de libération nationale, appartenaient à cette élite étatique réformiste, dont les premières générations se trouvèrent à l'origine du mouvement de modernisation au sein de l'Empire ottoman, dès les débuts du xixe siècle. Héritier de plusieurs générations de réformateurs ottomans, mais aussi puisant son inspiration dans le positivisme et le scientisme européens, Mustafa Kemal porta plus loin le mouvement de modernisation, en tournant le dos à la vaine chimère d'une résurgence du vieil Empire. Il opta pour la création d'un État moderne, dont la légitimité nationale et territoriale remplaça la légitimité ottomane fondée sur l'universalisme de l'Islam et dont le fondement sociologique était une alliance, scellée pendant la guerre d'indépendance nationale (1919-1922), entre les élites étatiques et les élites socio-économiques, telles que les commerçants des villes, les notables de province et les propriétaires terriens.
Dès lors, bâtie sur cette alliance et dirigée par les élites bureaucratiques, la République kémaliste allait s'employer à moderniser l'organisation sociale et culturelle du pays et à développer une économie nationale dont l'objectif était d'assurer l'industrialisation, ainsi que l'émergence d'une bourgeoisie nationale, à travers une accumulation capitaliste réalisée avec l'aide et la protection de l'État. Au libéralisme économique des années 1923-1929 devait succéder, dans les années 1930, des politiques économiques étatistes, permettant à la Turquie de connaître pendant cette décennie une industrialisation très rapide (le troisième taux de croissance économique mondial, derrière l'Union soviétique et le Japon) et à la bourgeoisie des affaires de procéder à une accumulation primitive sous l'aile protectrice de l'État.
Le renforcement de la classe capitaliste turque la conduit, dans les années qui suivirent la Seconde Guerre mondiale, à contester la tutelle de la bureaucratie et à chercher à transformer sa puissance économique en pouvoir politique. Sous la pression conjuguée de la bourgeoisie sur le plan domestique et des États-Unis à l'extérieur, qui veulent ouvrir le marché turc à leurs produits d'exportation, en y imposant le libéralisme économique, le régime de parti unique laisse la place au multipartisme, en 1946. Les élections législatives de 1950, les premières qui soient réellement libres, sont gagnées par le Parti démocrate, représentant la bourgeoisie d'affaires et les propriétaires terriens, au détriment du Parti républicain du peuple, créé par Atatürk et resté au pouvoir sans interruption de 1923 à 1950. De nombreux changements interviennent dans les années 1950, dont certains semblent mettre en cause les acquis[...]
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Écrit par
- Michel BOZDÉMIR : professeur émérite de langue et civilisation turques
- Ali KAZANCIGIL
: politologue, essayiste, directeur de la revue
Anatoli : de l'Adriatique à la Caspienne - Robert MANTRAN : membre de l'Institut, professeur émérite à l'université de Provence-Aix-Marseille-I
- Élise MASSICARD : directrice de recherche CNRS/CERI Sciences Po
- Jean-François PÉROUSE : enseignant-chercheur, université de Toulouse Jean Jaurès
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
Classification
Médias
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