- 1. La prototypographie
- 2. D'Alde Manuce à Robert Estienne
- 3. Du romain du Roi aux Didot
- 4. Révolution et romantisme
- 5. L'ère industrielle et l'Art nouveau
- 6. Débuts du design et « synthèse des arts »
- 7. Vers une Nouvelle typographie
- 8. Traditions britannique et française
- 9. Crispation idéologique et perpétuation du modernisme
- 10. Le recours à la tradition
- 11. Bouleversements technologiques et diversités graphiques
- 12. Réseaux, flux, numérisation
- 13. Le triomphe du numérique
- 14. Bibliographie
TYPOGRAPHIE
D'Alde Manuce à Robert Estienne
Au tournant du xve-xvie siècle à Venise, dans l'atelier de l'éditeur et imprimeur Alde Manuce (1449-1515), apparaissent des types romains dus au graveur Francesco Griffo (1450-1517). D'une haute tenue technique et esthétique, ceux-ci sont complétés d'une série dite cancelleresque qui sera désignée plus tard sous le terme d'italiques. Plus propices que les humanes à des compositions aérées de la page et s'écartant nettement des modèles manuscrits, ces caractères s'exportent en France, où Henri Ier Estienne (1470-1520), puis son successeur Simon de Colines (1480-1546), les adoptent. Geoffroy Tory (vers 1480-vers 1533), quant à lui, définit dans son ouvrage Le Champfleury (1529) une méthode de construction de la lettre réglée sur les proportions du corps humain, puisée aux théories de l'humanisme. À ce désir de réforme typographique s'ajoute la volonté de la monarchie française de se doter d'une langue distincte et codifiée, ce que sanctionne l'édit de Villers-Cotterêts (1539), en substituant le français au latin dans les usages officiels.
Robert Estienne (1503-1559) s'affirme comme un des premiers philologues, dont le travail de redécouverte des textes sacrés et de leur juste représentation confère une dimension supplémentaire à la réforme typographique : celle de la réforme religieuse. Il publie les Écritures dans des compositions inédites, expurgées par ses soins des multiples ajouts du Moyen Âge et réglées sur la présentation comparative des versions hébraïque, grecque, latine et française. À cet effet, il façonne un appareil typographique inspiré du modèle aldin, dont tout ou partie a été gravé par Claude Garamond (1499-1561). Dans son sillage, de nombreux imprimeurs et typographes réformés, Robert Haultin (vers 1510-1587), Guillaume Le Bé (1525-1598), Jean de Tournes (1504-1564), promeuvent une floraison de types de grande qualité, possédant un rare équilibre entre les pleins et les déliés, popularisés sous le terme générique de Garamond.
Après la mort de François Ier, Robert Estienne fait face à la vindicte des théologiens de la Sorbonne et est obligé de fuir à Genève. Ses types romains se propagent en Europe grâce à François Guyot, responsable du fonds typographique de l'Officina Plantiniana à Anvers, et à Jacques Sabon (1535-vers 1580), autre réformé émigré, chef d'atelier de la fonderie Egelnoff, à Francfort. Leur leçon est reprise par la suite par Christoffel van Dijck (1601-1669), à Amsterdam, les Elzevier à Leyde, et par Johann Michael Fleischman (1701-1768), ce dernier assurant la renommée de la fonderie Enschedé à Haarlem.
À la fin du xvie siècle, face au protestantisme, l'église catholique engage la Contre-Réforme pour affirmer sa domination intellectuelle et culturelle et fait mainmise sur l'imprimerie. Elle mobilise les meilleurs typographes, souvent des disciples d'Estienne comme Christophe Plantin (1514-1520) à Anvers, ou Robert Granjon (1513-1589) installé au Vatican. Au demeurant, les règles forgées par les typographes calvinistes – usage systématique des caractères latins, découpage de la Bible en versets et emploi des alinéas notamment – sont entérinées par l'Église.
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Écrit par
- Michel WLASSIKOFF : historien du graphisme et de la typographie, diplômé en histoire de l'École des hautes études en sciences sociales, Paris
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Média
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