JACOBSON ULLA (1929-1982)
En 1951, la sélection suédoise du festival de Cannes, Elle n'a dansé qu'un seul été, du réalisateur Arne Mattsson, connaissait un beau succès de scandale pour des raisons qui seraient jugées, aujourd'hui, bien surprenantes : un jeune comédien et sa partenaire féminine se baignaient en toute spontanéité dans le plus simple appareil ! Si le film n'imposa pas véritablement le nom du réalisateur sur le marché européen, il contribua au lancement d'une jeune vedette d'une grande authenticité, Ulla Jacobson, qui préfigurait les remarquables comédiennes de l'univers d'Ingmar Bergman. Née à Göteborg, cette jeune actrice avait déjà une solide expérience théâtrale lorsqu'elle débuta dans le film précédent de Mattsson : Les Mers que nous parcourons. En Suède, elle va tourner alors de nombreux films inspirés de romanciers ou dramaturges scandinaves, tels Strindberg : Toute la joie de la terre, Karin Mandsotter d'Alf Sjöberg (le réalisateur de Mademoiselle Julie), Le Trésor d'Arne de Molander. Elle tourne également pour Wolfgang Liebeneiner Éternel Amour et Le Pieux Mensonge en république fédérale d'Allemagne. Mais ce n'est qu'avec le film suivant que son jeu prend une exceptionnelle dimension : dirigée par son compatriote Ingmar Bergman, elle est la jeune bourgeoise de Sourires d'une nuit d'été (1955), mariée à un homme bien plus âgé. Elle séduit les deux sexes dans un rôle qui n'est pas sans évoquer celui de Katharine Hepburn dans Sylvia Scarlett de George Cukor.
On espérait la retrouver, comme ses compatriotes Ingrid Thulin, Liv Ullmann ou Bibi Andersson, dans les autres films du réalisateur. Mais, apparemment, l'actrice a préféré choisir une carrière internationale – à moins que Bergman n'ait pas souhaité continuer à la voir évoluer dans son univers. Elle tournera donc en France Crime et châtiment de Georges Lampin (1956), remake du film réalisé par Pierre Chenal dans les années 1930, puis en Allemagne fédérale, un film de Luigi Comencini inédit en France et un remake de La Charrette fantôme en 1958 – toujours sous la direction de Molander – dans lequel elle reprend le rôle de la jeune salutiste. Sollicitée par les studios hollywoodiens au début des années 1960, elle tournera quelques films qui n'ajoutent rien à sa notoriété : une comédie de David Swift, Le Grand-Duc et l'héritière, au côté de Charles Boyer ; une superproduction d'Anthony Mann, Les Héros de Télémark (1965), et Zoulou (1964), production britannique de Cy Endfield. Puis elle revient en France à la fin des années 1960, où elle tourne Adolphe ou l'Âge tendre de Bernard T. Michel, au côté de Philippe Noiret, et La Servante. Alors qu'on l'avait un peu perdue de vue, on la retrouve avec surprise en 1975 dans le film de Fassbinder Le Droit du plus fort. Fidèle aux acteurs et aux actrices qui l'avaient marqué dans son enfance, le réalisateur lui avait demandé d'interpréter un rôle de bourgeoise, mère de l'un des protagonistes du film.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- André-Charles COHEN : critique de cinéma, traducteur
Classification