HUTTEN ULRICH VON (1488-1523)
Né dans une famille de hobereaux franconiens, Ulrich von Hutten fut envoyé à l'abbaye de Fulda pour s'y préparer à la carrière ecclésiastique. Il s'en sauva, encourant la malédiction de son père, pour une vie errante à travers l'Allemagne et l'Italie. Dans ce pays (1512-1513), il conçut une vive antipathie pour la cour de Rome et un ardent désir de relever sa patrie. Le chevalier Ulrich von Hutten devint alors un polémiste humaniste qui mena, non sans talent, une lutte violente par la plume, en latin et en allemand, contre l'Église romaine (Phalarismus, 1516 ; Vadiscus, 1520) et les princes (Nemo, 1512-1518 ; Aula, 1518). Avec son ami Crotus Rubeanus, il critique les Dominicains, et plus précisément les ennemis de Reuchlin, dans les Épîtres des hommes obscurs (Epistolae virorum obscurorum, 1515) ; il publie, avec une préface méprisante pour Léon X, l'ouvrage par lequel Lorenzo Valla démontrait la fausseté du document dit Donation de Constantin, fondement traditionnel des prétentions temporelles de la papauté. En outre, il répand des écrits incendiaires contre Rome. Dans son dialogue Arminius (1524) apparaît l'idéal du champion d'une Allemagne libérée du joug romain, symbole du sentiment national allemand. Hutten se présente, en effet, comme le héraut de la petite noblesse allemande du Sud, déchue et dressée contre l'organisation impériale et les classes nanties. Il veut alors faire de Franz von Sickingen le chef d'une révolution nationaliste qui, fondée sur la foi réformée, instituerait la « liberté germanique ». Le soulèvement, auquel Luther s'est opposé lors de la diète de Worms et qu'il a fait ainsi échouer, éclate en janvier 1522. Mais Sickingen, arrêté par la résistance de l'archevêque de Trèves, est tué le 7 mai 1523. Menacé par ses ennemis, Hutten se réfugie en Suisse avec l'espoir d'y recruter des troupes ; il meurt dans l'île d'Uffenau, sur le lac de Zurich.
Hutten a vu en Luther le précurseur de la liberté de l'esprit et de celle de la nation allemande, mais sans vraiment comprendre les préoccupations fondamentales du réformateur.
Ce défenseur de la chevalerie (Ritterstand) et du patriotisme germanique (il faisait de la Germania de Tacite son livre de référence) était aussi un savant et un humaniste. Il publia un Ars versificandi (1511) et un traité sur la syphilis (Morbus gallicus, 1519). Après 1520, il se mit à écrire en allemand, notamment des dialogues satiriques (Gesprächsbüchlein, 1521). La fin de sa vie fut occupée par une dispute avec Érasme.
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Écrit par
- Bernard VOGLER : docteur ès lettres, professeur d'histoire de l'Alsace à l'université de Strasbourg-II
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