ZWINGLI ULRICH (1484-1531)
Progrès de la Réforme en Suisse. La guerre de Kappel
Restait à assurer l'extension de la Réforme à la Suisse, et d'abord aux bailliages communs (gemeine Herrschaften), sur lesquels Zurich avait des droits qu'il partageait avec les cinq cantons de l'intérieur (Urkantone). Ceux-ci réagirent en s'unissant (ligue de Beckenried, avr. 1524) et en ralliant la majorité des cantons, à la diète de Baden Argovie (mai 1526), pour condamner Zwingli in absentia. Ce fut en partie l'œuvre de J. Eck. À Rome même, où le secrétaire municipal Joachim am Grüt dénonça Zwingli, Clément VII chargea Cajétan de le réfuter. Peu après, Zwingli s'entendit avec Berne pour organiser une dispute à grand spectacle (janv. 1528), qui lui donna l'occasion d'une revanche. Une ligue évangélique se forma, à laquelle adhérèrent successivement Berne, Saint-Gall, Bâle (1529). À Zurich même, Zwingli se débarrassa des adversaires les plus gênants, notamment parmi les patriciens, en les évinçant du Conseil ; l'exécution de Jakob Grebel, conseiller municipal accusé d'avoir touché une pension de l'étranger, servit d'exemple (30 oct. 1526). De leur côté, les cantons catholiques invoquèrent l'aide de l'archiduc Ferdinand (ligue de Feldkirch, févr. 1529). Un conflit armé paraissait inévitable. Zwingli proposa d'ouvrir aussitôt les hostilités (fin mai 1529), ce qui eut lieu peu après (9 juin). La première paix de Kappel, qui fut à l'avantage des Évangéliques, obligea les cinq cantons à renoncer à l'alliance avec l'Autriche et permit aux communautés des bailliages communs d'adopter la Réforme sur décision de la majorité. Au dehors, notamment en Allemagne du Sud, les progrès de la réforme zwinglienne furent contrariés par le différend qui, à partir de 1525, opposa Zwingli à Luther sur la question de la cène (la première expression de la doctrine zwinglienne de la cène se trouve dans une lettre à Matthäus Alber, nov. 1524). En vain Zwingli et ses partisans, dont Bucer, arguaient-ils qu'il suffisait de s'entendre sur les vérités chrétiennes essentielles (au nombre desquelles ils ne rangeaient pas la doctrine eucharistique) pour former une ligue politique (Bündnis vor Bekenntnis) ; les Luthériens renversaient les termes. La conférence de Marburg convoquée à cet effet par le landgrave Philippe de Hesse (oct. 1529) fut sans résultat, et la diète d'Augsbourg (1530) donna lieu à des confessions de foi séparées. En même temps, le projet de Zwingli de grouper les États évangéliques de la mer du Nord à la Suisse en une coalition européenne anti-habsbourgeoise devint caduc. En Suisse même, Zwingli était résolu à donner la primauté à deux États – Zurich et Berne – et à modifier le statut de la Confédération à leur profit, ce qui permettrait d'évincer les cantons catholiques de l'administration des bailliages communs. Cette proposition hardie ne fut pas retenue. Il en fut de même du mémoire par lequel Zwingli préconisait l'offensive militaire immédiate contre les cinq cantons (début juin 1531). Conseiller écouté, notamment du Conseil secret chargé de la politique extérieure, il n'était pas néanmoins, on le voit, le maître incontesté de la politique zurichoise. Commission permanente ou véritable institution, la nature du Conseil secret est aujourd'hui discutée (L. von Muralt, W. Jacob contre E. Fabian) ; Zwingli n'en était pas membre, il était seulement rapporteur pour les questions de la compétence de ce Conseil. Si l'on prend une à une les suggestions contenues dans les mémoires sortis de sa plume (C.R., VI, i et ii), on s'aperçoit que les pouvoirs responsables n'en ont retenu qu'une partie, tandis qu'en revanche – à en juger par les mandements disciplinaires qui allèrent jusqu'à prescrire l'assistance au culte comme[...]
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Écrit par
- Jacques Vincent POLLET : maître de recherche honoraire au C.N.R.S.
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