ZWINGLI ULRICH (1484-1531)
La pensée religieuse de Zwingli
Zwingli a traduit et commenté vingt et un livres de l'Ancien Testament (C.R., XIII, XIV) à l'occasion de la Prophezei, cercle d'études bibliques remplaçant l'office choral et inauguré le 19 juin 1525. La Bible de Zurich (1529) est le fruit de ce travail. Les sermons, dont il ne reste que des notes d'auditeurs (publiées en partie par O. Farner), suivent l'ordre des leçons de la Prophezei. Quelques sermons de circonstance sur un thème particulier ont été retravaillés et publiés par Zwingli lui-même : sur la liberté du chrétien en matière d'abstinence et sur la Vierge Marie (1522), sur la justice divine et la justice humaine (1523), le pasteur (1524), la Providence (1529). Il existe, en outre, des traités plus systématiques ou résumés de la foi chrétienne : Auslegung und Gründe der Schlussreden (1523) ; Commentarius de vera et falsa religione, que connaissait Calvin ; Fidei ratio (1530), parallèle à la Confession d'Augsbourg ; Fidei professio (1531), dédié à François Ier (autographe à Paris, Bibl. nat.) ; des traités d'allure polémique sur le baptême et la Cène dirigés contre les baptistes et Luther (1525-1529).
La pensée religieuse de Zwingli peut se définir comme un effort de simplification et d'épuration de la religion en même temps que d'harmonisation des données de la raison et de la Révélation. Ces tendances étant apparemment contraires, l'accord entre elles ne se réalise que par voie dialectique. L'unification se fait autour de l'idée de Dieu, dont Zwingli met en relief la transcendance et la simplicité. L'unité ou unicité de l'être (Wesen) divin le retient surtout ; les personnes divines passent à l'arrière-plan ; les principaux attributs de Dieu – justice et miséricorde – se fondent dans la souveraine bonté, qui exprime au mieux l'essence divine et en laquelle se rejoignent le Dieu-Père du christianisme et le Deus optimus maximus des Anciens. Or Dieu est Esprit. La notion d'esprit est prise au sens objectif et universaliste ; elle fonde le spiritualisme zwinglien et son extension du fait qu'elle permet de passer de Dieu au monde. L'esprit de l'homme a, en effet, une affinité avec l'Esprit de Dieu ; à la limite, ils ne font qu'un. Le dualisme radical entre le Dieu transcendant et la créature, encore renforcé par le péché, semble ici s'atténuer. En même temps, l'unicité et l'universalité de l'Esprit permettent de résoudre dans le sens d'une unité dialectique les oppositions entre Révélation comme Heilsgeschichte (histoire du salut) et Révélation comme oracle de Dieu, entre connaissance naturelle de Dieu et foi, entre Loi et Évangile, entre justice divine et justice humaine et, plus radicalement encore, entre intellectualisme et volontarisme. En maints endroits, Zwingli affirme le primat de l'intelligence en Dieu (Dieu est vérité ; lex est lux ; la Révélation est l'abord illumination de l'intelligence) à la suite de saint Augustin (Illuminationstheorie) et de saint Thomas d'Aquin. Dans le De providentia (1529), la Heilsgeschichte semble n'avoir d'autre but que de manifester les attributs divins dans leur diversité et leur unité (théorie de la satisfaction inspirée de saint Anselme ; la prédestination est rattachée à la providence au sens de prévision ; etc.). Cependant, le volontarisme d'origine scotiste l'emporte chez Zwingli : Dieu est considéré comme la seule cause efficiente véritable ; la nature est le terrain de son action ; le Christ lui-même dans son humanité n'est qu'instrument ou « organe » de la divinité ; la tare originelle (appelée Presten, ou maladie incurable) ne devient péché que par transgression actuelle ; la religion est fondée sur l'Alliance (foedus, pactum[...]
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Écrit par
- Jacques Vincent POLLET : maître de recherche honoraire au C.N.R.S.
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