UN LIEU À SOI, Virginia Woolf Fiche de lecture
Dans Un lieu à soi, Virginia Woolf donne libre cours à son talent d’essayiste, pour lequel elle fut d'abord connue. Né de deux conférences sur « Les femmes et la fiction » prononcées à l'université de Cambridge – plus exactement à Newnham College le 20 octobre 1928 et à Girton College le 26 octobre de la même année –, cet essai fut publié le 24 octobre 1929 par la Hogarth Press, la maison d'édition de Leonard et Virginia Woolf, et par Harcourt Brace, aux États-Unis. Ce fut un succès immédiat, qui ne s'est pas démenti depuis. En France, l’essai ne fut cependant découvert qu'en 1951 avec la traduction de Clara Malraux, Une chambre à soi, et redécouvert au début du xxie siècle dans de nouvelles traductions.
« Un être étrange, composite, fait son apparition… »
Dans cet essai, par l'intermédiaire de sa narratriceà l’identité plurielle et instable, Virginia Woolf revendique tout d'abord le droit de fouler la pelouse des colleges de Cambridge, pour la plupart réservé aux hommes (seuls Newnham et Girton, créés en 1869 et 1871, accueillaient des femmes) et d'accéder à leur bibliothèque. Le droit de transgresser les limites de ces espaces masculins devient emblématique de la transgression plus générale que Woolf appelle de ses vœux. L’auteure dénonce les lois de 1870 et 1882, qui ont longtemps réduit les femmes à la pauvreté en les privant de tout droit à la propriété une fois mariées, et à l'invisibilité. Dans le domaine de la culture et des arts, seuls les hommes ont eu droit de cité, comme le montre le dôme de la salle de lecture de la grande bibliothèque du British Museum, où figurent uniquement des noms de « grands hommes ». Afin d’illustrer la difficulté rencontrée par les femmes au cours des siècles pour se faire entendre, Woolf recourt à une fable qui met en scène une sœur imaginaire de Shakespeare, Judith, très douée mais éconduite des théâtres londoniens à cause de son genre, séduite par un écrivain et acculée au suicide – en d’autres termes, réduite au silence par les lois de la société patriarcale.
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Écrit par
- Christine REYNIER : professeure des Universités, docteure en littérature britannique, agrégée d'anglais
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WOOLF VIRGINIA (1882-1941)
- Écrit par Christine REYNIER
- 4 211 mots
- 4 médias
...siècles qu’il traverse. Cette biographie fictionnelle de Vita Sackville-West, que l’écrivaine rencontra en 1922 et qui fut un temps son amante, sera suivie par l’essai A Room of One’sOwn (1929, Un lieu à soi, ou Une chambre à soi dans la traduction de Clara Malraux), dans lequel Woolf dénonce l’inégalité...