Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

UNKEI (1148 env.-1223)

Les œuvres de l'âge mûr

C'est aux œuvres de sa maturité qu'Unkei doit sa renommée. Citons parmi elles les deux gardiens géants de la grande porte sud du Tōdai-ji de Nara, exécutés en 1203, avec la collaboration de Kaikei et de seize assistants.

Ces personnages colossaux (environ huit mètres de haut) sont remarquables par leur position dynamique et bien équilibrée. Leur expression menaçante, leur fort hanchement, leurs gestes brusques et violents, leurs muscles tendus et leurs vêtements tourmentés leur confèrent un air de virilité majestueuse et réalisent un nouvel expressionnisme, que n'altère pas l'usure apportée par des siècles d'exposition en plein air.

Les blocs de bois juxtaposés, dont les jointures sont actuellement desserrées, offrent un exemple parfait de la technique d'Unkei. On lui doit en effet d'avoir perfectionné la méthode par pièces assemblées (yosegi), à laquelle reste lié le nom de Jōchō. Ce facteur sera déterminant pour l'épanouissement d'un nouveau réalisme dans le portrait, car l'artiste, moins entravé par les limites que lui impose la matière qu'il travaille, va se trouver plus libre et plus apte à traduire dans le bois la réalité qu'il appréhende. De plus, les yeux de cristal, encastrés dans les orbites creuses, selon une technique neuve elle aussi, accentuent encore l'allure réaliste et terrifiante des personnages.

Ces deux gardiens et d'autres œuvres de la même période, comme le Miroku et les portraits de Seshin et Muchaku au Kōfuku-ji de Nara, jusqu'au Jizō Bosatsu de 1218 au Rokuharamitsu-ji de Kyōto, dernière pièce datée qui nous soit parvenue, témoignent de tout ce que le style de Kamakura doit à la personnalité d'Unkei, tant pour sa qualité spirituelle que pour ses innovations pratiques.

Malheureusement, si Unkei s'avère le créateur de génie qui fait le renom de son époque, ses élèves au nombre desquels ses fils, Tankei, Kōben et Kōshō, perdront vite sa belle vigueur. Multipliant les images de propagande, ils recherchent le détail pittoresque propre à frapper l'imagination des foules, afin de populariser un bouddhisme dont l'aristocratie ne peut plus assurer la subsistance. En outre, le bouddhisme Zen, dont l'influence va grandissant, est peu favorable aux représentations de divinités. Le lavis à l'encre de Chine prendra bientôt la place de la sculpture, qui ne sera plus pratiquée que par des artisans.

— Marie MATHELIN

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Autres références

  • JAPON (Arts et culture) - Les arts

    • Écrit par , , , , , , , , , et
    • 56 170 mots
    • 35 médias
    L'artisan majeur de cette renaissance fut Unkei, qui laissa des œuvres d'une portée universelle, tel le portrait imaginaire de Muchaku, l'un des pères de la secte Hossō. Le corps massif est enveloppé dans une robe sillonnée de plis puissants mais paisibles. Seules les mains sont en mouvement, mais la...
  • NARA, TRÉSORS BOUDDHIQUES DU JAPON ANCIEN. LE TEMPLE KŌFUKUJI (exposition)

    • Écrit par
    • 1 583 mots

    Haut lieu de la pensée et de l’art bouddhiques, le monastère du Kōfukuji fut un des plus grands temples du Japon entre le viie et le xiie siècle. Les images du panthéon bouddhique, peintes ou sculptées, qui en ornaient les principaux édifices étaient des objets de culte hautement vénérés. Dans...