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SINCLAIR UPTON (1878-1968)

D'abord révolté, puis révolutionnaire, Upton Sinclair se présente résolument comme un romancier idéologue, dont l'œuvre est non seulement le reflet, mais aussi le prolongement actif d'une vision politique du monde. Socialiste convaincu, il introduit dans le roman le prolétariat industriel et la lutte des classes, faisant ainsi figure de précurseur au sein de la littérature américaine. Son roman le plus célèbre, et sans doute le plus achevé, reste La Jungle (1906), qui dénonce les conditions humaines et sanitaires des abattoirs de Chicago : d'un côté, la fabrication de conserves avariées, de l'autre l'exploitation du travailleur (ici un immigrant d'origine lituanienne). Ce réquisitoire implacable et solidement documenté, qui eut lors de sa parution un retentissement de scandale dépassant largement les États-Unis et qui influença la législation américaine sur les produits alimentaires, reste l'un des chefs-d'œuvre du muckraking, courant de révolte et de dénonciation que suscitèrent, chez des journalistes et des écrivains, les abus les plus criants de la société américaine.

Mais Sinclair va plus loin que les muckrakers : chez lui, la critique de l'injustice sociale s'articule sur une pensée politique qui réfute le système capitaliste dans son ensemble et lui permet d'en saisir les principales interactions. C'est ainsi qu'à côté d'ouvrages-reportages dont le sujet suit de très près l'événement (Boston, 1928, traite de l'affaire Sacco et Vanzetti), il analyse l'asservissement au capitalisme d'institutions comme l'université, la presse et les Églises (The Profits of Religion, 1918). Non que Sinclair soit un ennemi de la religion. Son socialisme est fortement teinté de religiosité, comme l'atteste tout un vocabulaire auquel il a fréquemment recours. Par ailleurs, les problèmes de l'individu et de la morale sont au cœur de ses préoccupations, si bien que sa conception du passage au socialisme relève davantage du socialisme utopique que d'une perspective marxiste. En 1934, il manque de peu de se faire élire gouverneur démocrate sur la base de son programme socialiste E.P.I.C. (End Poverty in California). De 1940 à 1953, il travaille à un cycle de romans dont le héros, Lanny Budd, parcourt l'histoire du monde de 1913 aux années 1950. Dragons's Teeth (1942), le troisième des onze romans du cycle, obtient le prix Pulitzer. Son autobiographie paraît en 1962.

— Jean-Paul ROSPARS

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, maître assistant à l'Institut Charles-V, université de Paris-VII-Denis-Diderot

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