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GYOKUDŌ URAGAMI (1745-1821)

Artiste japonais, Uragami Heiyemon fut tout jeune attaché au service du clan Ikeda de Kamogata, établi à Okayama en Bizen. Il accompagna à plusieurs reprises Ikeda Seiko, le fils de son maître, à Edo. Il y fut initié à la science confucéenne et s'intéressa à la musique et à la peinture. En 1768, lors de la mort prématurée de Seiko, il trouva un refuge dans l'étude et se livra à ses passe-temps favoris : jeux de l'encre (calligraphie et peinture) et koto (luth à sept cordes). Il négligea son service et eut aussi quelques ennuis pour s'être trop intéressé à la pensée de Wang Yangming, dont les idées n'étaient pas en accord avec le confucianisme orthodoxe pratiqué par les Tokugawa. En 1794, quittant Okayama avec ses deux fils, il parvenait à échapper à ses liens féodaux. Il mena dès lors une vie d'errance, portant sur son dos son koto, instrument précieux dont l'inscription « Gyoku-dō » (Pavillon de jade) devint son nom de pinceau. Il vécut alors de sa musique et aussi de sa peinture. Ses premières œuvres sont mal connues. Quelques spécimens ont subsisté, le montrant fidèle au pointillisme de Mi Fu et à l'imitation des grands maîtres de l'époque Yuan qu'il avait dû connaître grâce à des albums illustrés de gravures. Ces peintures s'accompagnent de poèmes qui mettent en valeur la beauté de sa calligraphie.

En 1811, Gyokudō vint s'établir à Kyōto et fréquenta les adeptes du Nanga (peinture de l'école du Sud ou des lettrés), tels Chikuden et Okada Beisanjin. À cette date, il avait trouvé dans ses paysages à l'encre (kakemono et feuilles d'album), parfois rehaussés de couleurs légères, des formules très personnelles dans lesquelles s'expriment un vif sentiment de la nature et du passage des saisons, une certaine mélancolie et surtout sa révolte contre les contraintes de la vie féodale. La distorsion de l'espace, l'emploi d'un graphisme où les cercles modelant les formes alternent avec des traits parallèles, la profondeur des encrages et le jeu des lumières à travers les brumes (Album des brumes et des nuages, daté de 1811) caractérisent ses dernières œuvres.

Bien qu'il n'ait peut-être pas connu leurs œuvres, son art évoque, avec moins de vigueur, celui des indépendants, peintres chinois de la fin des Ming (Shitao et Bada Shanren). Gyokudō fut peu apprécié de son vivant, à l'exception de son petit cercle de Kyōto, et resta longtemps oublié. La révélation relativement tardive au Japon des indépendants chinois du xviie siècle a permis de comprendre l'originalité de l'artiste, qui est aujourd'hui très prisé et considéré à juste titre comme un peintre de premier plan.

— Madeleine PAUL-DAVID

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Écrit par

  • : ancien maître de recherche au CNRS, professeure honoraire à l'École du Louvre, chargée de mission au Musée national des arts asiatiques-Guimet

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