LEYEN URSULA VON DER (1958- )
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Une femme allemande
Première femme à occuper le poste de président de la Commission européenne, Ursula von der Leyen n’a pas, sur le papier, la même envergure politique que ses prédécesseurs, tous anciens Premiers ministres depuis le départ de Jacques Delors en 1995. Ministre fédérale de la Famille, des personnes âgées, de la condition féminine et de la jeunesse (2005-2009), du Travail et des affaires sociales (2009-2013), puis de la Défense (2013-2019), elle n’a pas occupé les plus hauts postes du Bundesregierung(gouvernement fédéral allemand),même si son nom fut un temps évoqué pour succéder à Angela Merkel. Elle ne manque cependant pas d’atouts. Cinquante-deux ans après le tout premier président de la Commission de la CEE, Walter Hallstein, elle est la seconde personnalité allemande à occuper le poste de président de la Commission. Citoyenne du plus grand pays de l’Union, pays fondateur qui plus est, elle a été soutenue avec force par plusieurs chefs d’État et de gouvernement, en particulier par la France et son président Emmanuel Macron. Elle dispose d’un fort ancrage national et son parcours lui donne de nombreuses qualités pour incarner l’Europe. Née le 8 octobre 1958 à Ixelles en Belgique, elle est la fille d’un grand commis de l’Europe, Ernst Albrecht, qui a notamment occupé le poste de Directeur général de la concurrence de la CEE, ce qui fait d’elle la première présidente de la Commission issue d’une famille ayant participé d’aussi près à la construction européenne. Elle a vécu à Bruxelles jusqu’à treize ans, a été initiée dans sa jeunesse à la culture et aux langues (le français et l’anglais) de l’eurocratie, dont il est clair qu’elle maîtrise les usages. Docteur en médecine, même si son titre a été contesté (on l’a rétroactivement accusée de plagiat pour sa thèse de doctorat, mais l’université ne lui a finalement pas retiré son titre de docteur), elle dispose d’une solide formation en économie (elle est notamment diplômée de la London School of Economics) longtemps prisée à Bruxelles, avant que ne déferle la vague managériale. Enfin, comme son prédécesseur, elle est issue d’une droite relativement sociale, au carrefour des prises de positions des grands partis européens, ce qui lui permet d’incarner le consensus. Cette proche d’Angela Merkel s’est vu confier un premier portefeuille de ministre fédéral aux Affaires sociales, ce qui l’a conduite à une politique audacieuse en matière de crèches et de salaire parental. Par la suite, elle a défendu la mise en place du salaire minimum en tant que ministre du Travail. Quant à son expérience de ministre de la Défense, si elle a nui à sa popularité en Allemagne et a probablement contribué à déjouer les pronostics de ceux qui la voyaient succéder à Angela Merkel, elle est en phase avec le rapprochement franco-allemand sur la construction d’une défense européenne commune et avec sa volonté d’incarner un tournant géopolitique de l’Europe dans le contexte du Brexit et des turbulences de la politique internationale.
Aussi, le soutien des chefs d’État et de gouvernement et la personnalité d’Ursula von der Leyen étaient synonymes d’un changement de pratique du pouvoir, d’un retour à une division du travail politique européen plus classique et d’une plus grande et plus discrète habileté dans la gestion des relations entre les institutions et intérêts en présence. L’équilibre de son programme initial se voulait ainsi une promesse de cohésion et d’intégration. La gestion de la crise de la Covid-19 puis la guerre en Ukraine mettent à l’épreuve son goût du consensus et le volontarisme que réclame l’action publique européenne. Après les élections européennes de juin 2024, Ursula von der Leyen est réélue en juillet à la tête de la Commission par 401 voix sur 720.
(Voir également UNION EUROPÉENNE, chronologie[...]
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Écrit par
- Didier GEORGAKAKIS : professeur de science politique à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne et au Collège d'Europe de Bruges, chaire Jean Monnet, Belgique
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
Classification
Médias
Autres références
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JUNCKER JEAN-CLAUDE (1954- )
- Écrit par Didier GEORGAKAKIS
- 1 275 mots
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Dès le début de 2017, il annonce qu’il ne briguera pas un second mandat à la tête de la Commission. Le 1er novembre 2019, il est remplacé par l’Allemande Ursula von der Leyen.