VACCINS
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Par convention, on fixe le début de la science des vaccins au 14 mai 1796, ce jour où Edward Jenner inocule au jeune James Phipps le pus d’une pustule de cow-pox, la maladie de la vaccine de la vache, prélevé sur la trayeuse Sarah Nelms qui en était atteinte. Phipps développe quelques pustules, et guérit. Trois mois plus tard, Jenner lui inocule délibérément le contenu de pustules de variole humaine. La maladie n’apparaît pas. L’expérience, audacieuse, est répétée avec le même succès sur d’autres sujets : l’inoculation de la vaccine protège contre la variole.
À partir de 1798, l’inoculation comme on l’appelle en Grande-Bretagne, connaît un immense succès qui franchit immédiatement la Manche. En France, on utilisera plutôt le mot « vaccin », officiellement défini en 1801 comme une « substance organique propre à créer une réaction immunitaire contre la variole » (Décade philosophique du 10 ventôse an IX). Vaccin et vaccination sont précisément décrits dans le Dictionnaire des sciences médicales de Panckoucke de 1821. L’extension de ces mots à la protection contre d’autres maladies apparaît bien plus tard, lors des essais du vaccin contre le choléra des poules en 1879-1880. Ce sens élargi est rapidement accepté. De nos jours, selon le dictionnaire Le Robert, un vaccin est une « substance préparée à partir de microbes, virus ou parasites (tués, inactivés ou atténués par des procédés spéciaux), qui inoculée à un individu, lui confère une immunité contre le germe correspondant ».
De la vaccine aux vaccins
Quelque différents les uns des autres qu’ils puissent être, les vaccins ont en commun la propriété – leur fonction en médecine – d’induire une protection spécifique – l’immunité vaccinale – vis-à-vis d’un germe donné. Cette caractéristique repose sur l’activation du système immunitaire.
De manière schématique, ce dernier répond à l’introduction d’une substance étrangère à l’organisme – bactérie, virus et, en théorie, toute molécule différant de celles du sujet –, réponse complexe qui tend à l’élimination de l’intrus. Le système immunitaire possède deux bras armés spécialisés chacun dans un niveau de protection de l’organisme. L’immunité innée est la première ligne de défense de l’organisme. Ses composants existent chez tous les animaux et répondent immédiatement de façon non spécifique à toute atteinte de l’organisme. Dans le cas d’une infection, le système immunitaire inné reconnaît dans l’agent infectieux des familles de molécules qui agissent comme signaux de danger, ce qui déclenche immédiatement la réaction inflammatoire. Celle-ci attire sur le site un nombre croissant de diverses cellules du système immunitaire. Parmi celles-ci se trouvent les cellules effectrices de l’immunité adaptative – ou acquise, le second bras armé du système –, les lymphocytes B et lymphocytes T. Des récepteurs situés à la surface de ces cellules sont capables de reconnaître de manière précise de petits motifs moléculaires étrangers à l’organisme, mais présents sur les virus ou les bactéries. Ces motifs discrets, par exemple une boucle de trois ou quatre acides aminés dans une protéine, sont appelés épitopes ou encore motifs antigéniques, le terme d’antigène étant plutôt réservé à des particules ou des macromolécules porteuses d’un certain nombre d’épitopes. Les récepteurs des lymphocytes B sont des anticorps. À la suite de la reconnaissance de l’épitope qui leur est spécifique, les cellules sont activées, prolifèrent, se différencient et sécrètent des anticorps spécifiques de l’épitope. La maturation complète des lymphocytes B activés et la sécrétion finale d’anticorps de type IgG (pour immunoglobines de type G) prennent une dizaine de jours. Dans le cas d’une infection virale, aux lymphocytes B qui se différencient[...]
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Écrit par
- Gabriel GACHELIN : chercheur en histoire des sciences, université Paris VII-Denis-Diderot, ancien chef de service à l'Institut Pasteur
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Médias