- 1. Les avantages des vaccins à acides nucléiques (ADN, ARNm)
- 2. Construction des molécules vaccinales d’ADN ou d’ARN
- 3. Remplacer les adjuvants
- 4. Vecteurs sur mesure des molécules d’ADN ou d’ARNm
- 5. Vaccins à ARNm contre la Covid-19
- 6. Mode d’action des vaccins à ARNm
- 7. Perspectives thérapeutiques des vaccins à acides nucléiques
- 8. Bibliographie
VACCINS À ADN ET ARNm
La vaccination prophylactique repose sur l’usage d’un agent pathogène (bactérie ou virus) ou de ses fragments, pour induire une réponse immunitaire protectrice spécifique contre ce pathogène, sans induire de toxicité qui pourrait compromettre l’équilibre bénéfice/risque. Depuis la découverte du principe de la vaccination contre la variole par Edward Jenner en 1796, trois générations de vaccins peuvent être définies. La première est composée de vaccins contenant un agent pathogène vivant dont la virulence a été atténuée et de vaccins inactivés contenant un agent pathogène tué. Cette génération de vaccins a permis par exemple l’éradication de la variole et celle, presque complète, de la poliomyélite. La seconde génération comprend des vaccins « sous-unitaires » et repose sur l’utilisation de fragments d’agent infectieux, par exemple, une protéine virale produite par génie génétique en utilisant des bactéries ou des cellules cultivées dans des fermenteurs. Les vaccins contre le virus de l'hépatite B ou contre le papillomavirus entrent dans cette seconde génération. Ils contiennent la protéine vaccinale du virus et un adjuvant qui provoque la réponse inflammatoire nécessaire au développement de la réponse immunitaire spécifique.
La troisième génération de vaccins, dite à « acides nucléiques » (ADN ou ARNmessager, ARNm), repose sur un principe fondamentalement différent. L’idée et les premières expériences remontent aux années 1990 : faire produire le fragment d’agent infectieux (comme une protéine virale) directement par les cellules de l’individu à vacciner, transformant ainsi le corps en sa propre « usine à vaccin ». La réponse immunitaire spécifique de l’agent infectieux va être dans ce cas induite à partir de la protéine virale synthétisée in situ par les cellules de l’organe dans lequel a été administré le vaccin, généralement les cellules du muscle deltoïde chez l’humain. Comme les molécules d’acides nucléiques ne peuvent franchir seules la membrane des cellules, il faut nécessairement utiliser un vecteur pour réaliser l’étape d’internalisation indispensable pour la production de l’antigène. Deux types de vecteurs ont été mis au point, des vecteurs dits « viraux » issus de virus naturels, et des vecteurs non viraux, voire synthétiques, issus de la chimie organique. Les vecteurs viraux voient leur génome modifié par des techniques de biologie moléculaire pour les rendre non pathogènes, et on y a inséré le gène de l’antigène à produire par la cellule. Le virus recombinant pénètre dans la cellule comme le virus natif, et la protéine antigénique est exprimée normalement. Quant aux vecteurs synthétiques, les plus récents, ils vont utiliser des molécules chimiques dont les premiers représentants sont des lipides constitués de chaînes d’acides gras pour mimer la membrane cellulaire, auxquelles étaient liés de façon stable des groupements chargés positivement, car les acides nucléiques sont chargés négativement. Cette conception de vecteur s’inspire de la manière dont l’ADN est naturellement condensé par des groupements chargés positivement dans les noyaux des cellules. Jusqu’au début de 2020, un seul vaccin à ADN vectorisé par un vecteur viral était commercialisé sous le nom de Zabdeno® et utilisé contre l’infection à virus Ebola chez l’humain. Il a fait ses preuves lors de l’épidémie de 2013-2016 en Afrique de l’Ouest. Trois vaccins à ADN ont reçu les autorisations réglementaires nécessaires à leur exploitation commerciale pour protéger contre certaines maladies infectieuses des saumons d’élevage et des poulets, et contre le mélanome buccal des chiens. Le point de bascule dans l’usage humain de vaccins à ADN et ARNm à vecteurs synthétiques est encore plus récent : depuis la fin de 2020, plusieurs vaccins à acides nucléiques[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Bruno PITARD : directeur de recherche CNRS, unité immunology and new concepts in immunotherapy, Nantes université
Classification
Médias