- 1. Les avantages des vaccins à acides nucléiques (ADN, ARNm)
- 2. Construction des molécules vaccinales d’ADN ou d’ARN
- 3. Remplacer les adjuvants
- 4. Vecteurs sur mesure des molécules d’ADN ou d’ARNm
- 5. Vaccins à ARNm contre la Covid-19
- 6. Mode d’action des vaccins à ARNm
- 7. Perspectives thérapeutiques des vaccins à acides nucléiques
- 8. Bibliographie
VACCINS À ADN ET ARNm
Vaccins à ARNm contre la Covid-19
La pandémie de Covid-19 a fait apparaître l’urgence de développer rapidement un vaccin efficace contre le virus en cause, le SARS-CoV-2. D’emblée, les vaccins à ARNm semblaient faits pour répondre au moins à l’exigence de rapidité. À partir de la séquence du virus publiée dans Nature le 11 janvier 2020, les entreprises de biotechnologies, incluant Moderna, ont commencé à synthétiser un ARNm codant la protéine S (ou Spike). Cette protéine est située à la surface de l’enveloppe du SARS-CoV-2 et lui permet de se fixer à un récepteur cellulaire, l’enzyme de conversion de l'angiotensine 2 (ACE-2, présent sur les cellules du tractus respiratoire, de l’intestin, etc.) puis de pénétrer dans ces cellules : son rôle dans l’infection est donc central et elle est de fait une cible de vaccin. La protéine S est une grande protéine transmembranaire constituée de 1 273 acides aminés qui s’assemble en trimère et possède une conformation dite « préfusion » lorsqu’elle se trouve à la surface de la particule virale. Il s’avère que l’immunité contre les coronavirus avait beaucoup été étudiée à l’occasion des alertes de 2002-2003 (émergence du SARS-CoV-1 en Chine) et 2012 (émergence du MERS-CoV en Arabie Saoudite). Des modèles animaux avaient été développés et des essais cliniques de phase 1 d’un vaccin à ADN codant la protéine S de ces deux coronavirus avaient montré l’induction d’anticorps neutralisants chez les volontaires vaccinés. Il avait été montré que le déclenchement d’une réponse contre la protéine S selon la conformation « préfusion » protégeait contre l’infection. La protéine S du SARS CoV-2 a donc été la cible privilégiée de la plupart des vaccins développés en 2020. Dès la séquence du génome viral publiée, il a suffi de quelques jours pour produire à partir d’ADN de synthèse l’ARNm correspondant à la protéine S stabilisée en conformation « préfusion » (par deux résidus proline consécutifs dans la partie c-terminale de la protéine au niveau du site de clivage entre les sous-unités S1 et S2 en position 986 et 987 de la protéine S remplaçant respectivement les acides aminés lysine et valine). Il s’agit d’un délai incomparablement plus court que le temps nécessaire à la production de protéines ou à la culture du virus effectuée pour les plates-formes vaccinales classiques. En effet, les approches classiques exigent pour chaque « candidat vaccin » des étapes sur mesure, longues et coûteuses.
Les détails qui suivent sont donnés parce qu’ils illustrent ce qu’a été le premier développement d’un vaccin à ARN messager à usage général, qui plus est, mis au point au cours d’une pandémie. Dans un modèle animal (macaque rhésus) d’infection par le SARS-CoV-2, l’injection de deux doses de 30 ou 100 microgrammes (µg) d’ARNm du vaccin de Pfizer-BioNTech permettait de réduire les niveaux d'ARNm viral détectable chez les animaux vaccinés puis infectés par voie nasale et trachéale. Dans les essais de phase 1 et 2 chez l’humain, les titres d’anticorps neutralisants obtenus après deux doses de vaccin étaient comparables ou supérieurs à ceux des plasmas de patients convalescents. Ils étaient généralement plus élevés chez les 18-55 ans par rapport aux 65-85 ans, mais les réponses étaient comparables aux niveaux observés chez les patients convalescents dans les deux groupes d'âge. La dose de 30 μg d’ARNm a été choisie pour les essais de phase 2-3. La phase 3 conduite sur 40 000 personnes a démontré une efficacité de 95 % de protection contre la Covid-19.
Avec le vaccin de Moderna, qui utilise la même vectorisation, l’injection de deux doses de 10 ou 100 µg d’ARNm permettait d’obtenir l’indétectabilité du SARS-CoV-2 au niveau pulmonaire chez des macaques rhésus vaccinés puis infectés[...]
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Écrit par
- Bruno PITARD : directeur de recherche CNRS, unité immunology and new concepts in immunotherapy, Nantes université
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Médias