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VAN DOESBURG CHRISTIAN EMIL MARIE KÜPPER dit THEO (1883-1931)

Peintre originaire d'Utrecht, Van Doesburg termine ses études à l'académie de sa ville natale en 1889. Il s'attache aussitôt à une réflexion sur les problèmes de l'art contemporain, les sources, la signification, la portée des recherches dont il est témoin (cubisme, futurisme), réflexion qui fait l'objet d'articles critiques publiés, à partir de 1912, dans différents périodiques hollandais. La question des rapports entre la peinture comme phénomène dynamique et l'architecture comme phénomène spatial le conduit à entrer en rapport avec les architectes Oud et Wils en 1916, année où il fonde le groupe De Sphinx. L'année suivante, il participe avec Mondrian (qui vient de renoncer à toute figuration en spéculant sur la représentation de rythmes par la mise en œuvre de plans colorés et de tensions linéaires) et Oud à la fondation du groupe et de la revue De Stijl, dont il élaborera le programme en étroite communauté d'idées avec Mondrian. À ce titre, il a apporté une contribution fondamentale à la rédaction des manifestes du Stijl. Pour lui, face à la « confusion archaïque » entretenue par la persistance du « baroque moderne » (séquelles du modern style), la seule pensée capable d'élaborer une forme nouvelle « significative du développement de la conscience humaine » est la pensée plastique, laquelle est considérée comme activité essentielle, autonome, indépendante de toute contingence politique, philosophique, juridique, religieuse. Il importe dès lors de se soustraire aux illusions que la nature entretient, d'échapper aux relations homme-nature pour dégager, à partir d'un principe esthétique élémentaire — le contraste —, les relations plastiques élémentaires auxquelles le monde est assujetti. Centrées sur l'expérience intérieure, les formes engendrées selon cette naïve métaphysique seront, de même que les matériaux produits par la technologie moderne, dénaturalisées, donc « privées une fois pour toutes du pittoresque des formes anciennes ». Elles sont censées déboucher naturellement sur une nouvelle conception de la vie et de l'art, étant entendu que, frontispice du mouvement, « le but de la nature, c'est l'homme, et le but de l'homme, c'est le style ». Ces propositions théoriques sont de toute évidence l'émanation d'un idéalisme subjectif lié à une culture esthétisante de tradition bourgeoise. Elles font l'objet d'un traité qui rassemble l'essentiel des exposés faits en 1922, par Van Doesburg au Bauhaus et publiés sous le titre Principes fondamentaux de l'art nouveau (Grundbegriffe der neuen gestaltenden Kunst, 1924). Elles se traduisent dans une volonté de synthèse opérationnelle entre la peinture (pure) et l'architecture (froide), vouée à une stricte plasticité (jeu spatial), illustrée par la décoration de l'Aubette à Strasbourg (1927, détruite ; le ciné-dancing a été reconstitué de 1990 à 1994), incarnation de la « forme-esprit » dépersonnalisée et prétendue universelle selon le Manifeste de l'élémentarisme rédigé par Van Doesburg en 1926. Il reste à interroger, à découvrir la motivation profonde de l'intérêt surprenant porté, dès 1922, par cet adepte de l'ordre, de l'équilibre, de la pureté, de la rigueur, de l'absolu plastique, aux activités contestataires, déconstructivistes, anarchiques du mouvement dada. Le mécanisme de cette contradiction demande toujours a être démonté.

— Robert L. DELEVOY

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Écrit par

  • : directeur de l'École nationale supérieure d'architecture et des arts visuels, Bruxelles

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