ALEXAKIS VASSILIS (1943-2021)
Écrivain grec mais aussi dessinateur, journaliste et cinéaste, Vassilis Alexakis est né le 25 décembre 1943 à Athènes, dans le quartier populaire de Kallithea, peuplé de Grecs venus des îles de la mer Égée fuyant la misère et de réfugiés d’Asie Mineure chassés par les nationalistes turcs en 1922-1923. À cette époque, la capitale grecque était occupée par une armée allemande implacable et la population souffrait de famine.
La famille d’Alexakis était originaire de l’île de Santorin, d’où l’attachement de l’homme aux Cyclades. Ce qui l’amena à passer sa vie entre Paris, Athènes, où il est mort le 11 janvier 2021, et l’île de Tinos.
Il arrive à Paris en 1960 avec une bourse lui permettant de s’inscrire à l’École supérieure de journalisme de Lille. À l’époque, il ne parle pas un mot de français. Il restera trois ans avant de rentrer en Grèce, qui connaît en 1963 sa première ouverture démocratique avec l’arrivée au pouvoir du centriste Georges Papandréou. Cette ouverture, pourtant modérée, déplaît à Washington qui organise le coup d’État des colonels le 21 avril 1967.
Comme beaucoup de jeunes Grecs francophones, Alexakis réussit à rejoindre la France en 1968, où il va croiser nombre de réfugiés politiques. Il écrit alors des piges pour Le Monde, La Croix, Le Monde des livres et France Culture. Il réalise aussi cinq courts-métrages. Son premier roman, Le Sandwich, paraît en 1974 chez Julliard. Par la suite, l’écrivain va rencontrer l’écrivain-éditeur Jean-Marc Roberts (1954-2013) avec qui il se lie d’amitié et qui sera son éditeur au Seuil, puis chez Fayard et enfin chez Stock.
Grec par ses parents, français par ses enfants, Alexakis écrit ses romans soit en grec, soit en français. Espiègle, maniant volontiers l’autodérision et l’humour noir, il avait l’habitude de dire qu’il écrivait deux fois ses livres. Ce n’est donc pas un hasard s’il publie Paris-Athènesen 1989, La Langue maternelle en 1995, qui lui vaut le prix Médicis, et Les Mots étrangers en 2002. En 2007, avec Ap. J.-C., il est récompensé du grand prix de l’Académie française. Le livre mêle satire et érudition pour décrire la soif de pouvoir de l’Église orthodoxe grecque.
Paris-Athènes est une autobiographie aux allures de roman ; les mots de la langue maternelle appris à Athènes et Santorin, puis les mots découverts à Lille et à Paris forment la trame du livre. Vassilis Alexakis jouera continuellement et avec brio de cette double appartenance littéraire et linguistique. Son œuvre est à la fois marquée par l’importance de cette double culture et par l’omniprésence de la mort. De façon prémonitoire, il a écrit dans Paris-Athènes qu’il rêvait qu’il serait à Athènes quand la mort viendrait le chercher à Paris. Ce fut en effet le cas. La Clarinette, son dernier livre, publié en 2015, évoque en parallèle la mort de son ami Jean-Marc Roberts et la crise économique qui a ravagé la Grèce à partir de 2010, plongeant des millions d’habitants dans la précarité et la pauvreté.
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Écrit par
- Christophe CHICLET
: docteur en histoire du
xx e siècle de l'Institut d'études politiques, Paris, journaliste, membre du comité de rédaction de la revueConfluences Méditerranée
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