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VÉLO ou BICYCLETTE

Montée en puissance du vélo (1880-1914)

Avec les années 1880-1900 se joue le véritable take off du vélo. Cette accélération de son histoire et l'entrée de la vélocipédie dans les mœurs d'un nombre croissant de personnes sont liées à différents facteurs, notamment économiques et techniques. Dans les années 1880, le vélocipède fait place à la bicyclette (le mot est attesté au début de cette décennie) qui va susciter une véritable passion populaire pour la « petite reine ». La production de vélos passe de l'artisanat à l'industrie. Devenu produit manufacturé en série, le vélo voit son prix baisser et se popularise. Lancée en 1884 par l'industriel britannique John Kemp Starley, la safety bicycle, « bicyclette de sûreté », a déjà une forme familière, avec deux roues de taille moyenne et d'égal diamètre, une selle sur la potence centrale et une traction par chaîne (reprise du modèle créé sans succès par l'horloger français André Guilmet en 1869). Dix ans plus tard, les cadres en croix laissent la place aux cadres triangulaires. Surtout, plusieurs innovations majeures en améliorent le fonctionnement : la roue libre, le pneumatique démontable (mis au point par John Boyd Dunlop en 1888 et développé en France par Michelin dès 1891) et le changement de vitesses par dérailleur (testé dès 1869 et construit en série au début du xxe siècle). Mais ces améliorations techniques ne sont pas les seuls facteurs expliquant l'essor des années 1890-1900.

L'institution, la compétition et le champion

Avec les années 1880 naissent les premières institutions sportives. Avec la presse sportive, elles promeuvent le vélo. L'Union vélocipédique de France (U.V.F.), ancêtre de la Fédération cycliste actuelle, est fondée à Paris en 1881. Elle gère à la fois tourisme et compétition, tout comme les deux fédérations anglaises, la National Cyclists' Union (1878) et le Road Racing Council (1895). Mais ces dernières restent attachées à un strict amateurisme, ainsi que la première fédération internationale, l'International Cyclists' Association (I.C.A.), créée à Londres en 1892. Faire du vélo est alors la première pratique compétitive en France (la première pratique physique demeurant la gymnastique). Son emprise géographique s'étend : les zones rurales, les vallées en montagne sont peu à peu gagnées, sans entamer la suprématie des zones urbaines, plus ouvertes, mentalement et structurellement, à la modernisation. L'U.V.F., qui encadre plus de 2 000 sociétés cyclistes à la fin du siècle, tient sous sa coupe le monde de la compétition et participe, avec la presse et les constructeurs, à la création d'un premier calendrier compétitif qui éveille la curiosité d'un public qui dépasse de beaucoup celui des propriétaires de vélo : la course cycliste sur piste ou sur route est dans la plupart des cas un spectacle gratuit, facilement accessible. Le culte de la vitesse qui innerve le second xixe siècle se trouve au cœur de cette nouvelle passion.

En 1891, deux courses annoncent le succès du Tour de France. Patronné par le périodique bordelais Véloce-Sport, la course Bordeaux-Paris est réservée aux amateurs, pour garantir la participation des coureurs soi-disant amateurs anglais et écarter les meilleurs Français, déjà professionnels. En revanche, Paris-Brest-Paris, course de 1 200 kilomètres créée par Le Petit Journal de Pierre Giffard, est ouverte à tous. Charles Terront, un « pro » spécialisé dans les raids (Paris-Rome, Paris-Saint-Pétersbourg) gagne l'épreuve au terme de trois jours de course. Les deux courses exaltent les mêmes valeurs – force, endurance, combativité, mépris de l'adversité (pannes, chutes) – dans des épreuves sans assistance disputées sur des « montures » pesant couramment 25 kg. Ces courses se multiplient dans toute l'Europe avec, parmi[...]

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Écrit par

  • : docteur en histoire, Institut d'études politiques de Paris, maître de conférences

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