VERSAILLES ET SON CHÂTEAU
Versailles, miroir des princes
Les deux grands parterres d'eau encadrés par les statues des fleuves de France, le Grand Canal, la galerie des Glaces, les lueurs projetées par les bougies et les torches sur le mobilier d'argent, tout dans Versailles à son apogée reflète le spectacle d'un roi qui ordonne nuit et jour sa Cour comme le soleil règle la marche des planètes. Tout fonctionne dans le palais comme une « machine » (selon l'expression de Jean-Marie Apostolidès) à montrer la gloire du roi et à assurer la bonne administration du royaume. Jusqu'au Petit Trianon, construit par Gabriel entre 1763 et 1768 pour la favorite, Mme de Pompadour, ou à Marly, palais intime, où l'envers du décor est encore un décor. Même au Hameau, dans les fabriques dessinées par Mique, architecte préféré de la reine, Marie-Antoinette inventera cette vie sans étiquette dont les règles, évoquées par le Journal d'Élisabeth Vigée Le Brun, sont aussi impérieuses que tacites.
Reste à comprendre comment fonctionne la machine, en quoi a consisté sous l'Ancien Régime, ce spectacle que la monarchie donna à elle-même, à la France et au monde, et dont Versailles fut le théâtre absolu. La Cour, dans ce bâtiment, fut, écrit Saint-Simon, « un autre manège ». Le roi veut tout voir, conserver son monde autour de lui. La chasse et les jeux constituent, avec la conversation, les passe-temps essentiels de la Cour – même si l'actuel salon des Jeux, meublé par Riesener, ne date que de 1774. Le soir, on tient « appartement », parfois, lors d'un grand couvert, on écoute de la musique. Se succèdent bals parés et fêtes déguisées, comme le fameux « bal des Ifs » de 1745. On donne des fêtes nocturnes dans le bosquet de la Colonnade, construit par Mansart dans les dernières années du règne de Louis XIV.
La Cour reste mal logée. Saint-Simon doit attendre que sa femme devienne dame d'honneur de la duchesse de Berry pour bénéficier d'un appartement au château, Louis XVI installe près de lui Maurepas, son conseiller secret, non loin des antichambres : celle des Placets, ouverte à tous, celle de l'Œil-de-bœuf, pour les courtisans. La majorité des gentilshommes vit dans la ville de Versailles.
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Écrit par
- Adrien GOETZ : agrégé de l'Université, ancien élève de l'École normale supérieure, maître de conférences à l'université de Paris-IV-Sorbonne
Classification
Médias