VERTÉBRÉS
Émancipation
L'étude des autres appareils des Vertébrés peut s'insérer dans l'analyse d'un processus évolutif, celui d'émancipation. Comme tout être vivant, le Vertébré dépend du milieu extérieur qui lui fournit l'eau, les ions minéraux, des substances organiques, la lumière, les calories, etc., indispensables à son fonctionnement. Cette dépendance, très directe chez les formes tout à fait inférieures, tend à s'atténuer au cours de l'évolution vers les formes supérieures. Le perfectionnement d'organes déjà présents chez les premiers Vertébrés, l'apparition de fonctionnements nouveaux permettent peu à peu aux animaux de se libérer de certaines sujétions physiques et chimiques du milieu, ou d'en atténuer l'emprise, ou encore d'en diminuer le nombre, en un mot, de s'émanciper.
Première composante de cette émancipation, la régulation osmotique existe déjà chez la lamproie (non chez la myxine), tandis qu'elle manque aux Invertébrés marins ; cette fonction s'accompagne d'une régulation ionique déjà en œuvre chez bien des Invertébrés marins. Ces régulations, par des mécanismes actifs (qui consomment de l'énergie), maintiennent la pression osmotique du sang (et du milieu intérieur en général) et sa teneur en ions constantes et différentes de celles du milieu aquatique, marin ou d'eau douce, quelles que soient les fluctuations de ce milieu. Au contraire, les pressions osmotiques du milieu intérieur des Invertébrés marins et de Myxina sont celles de l'eau de mer.
Dans l'ensemble des Vertébrés non aquatiques, la pression osmotique du milieu intérieur se rapproche plus encore d'une valeur constante. Si, comme on le fait souvent, on l'exprime en fonction de l'abaissement du point de congélation (Δ 0C) par rapport à celui de l'eau pure (0 0C), ses valeurs s'établissent ainsi : — 1,8 à — 1,9 0C pour l'eau de mer ; — 0,65 à — 0,70 pour les Téléostéens marins ; — 1,85 à — 1,92 pour les Chondrichthyens, qui égalisent leur pression avec celle de l'eau de mer en concentrant l'urée dans le sang (urémie physiologique) ; — 0,45 à — 0,65 pour les Poissons d'eau douce ; — 0,45 pour les grenouilles ; — 0,55 à 0,58 pour les Mammifères. Cette fonction de régulation revient, chez les Poissons, non seulement au rein, mais aussi à la muqueuse pharyngienne, surface d'échanges faciles avec l'eau qui est un solvant. Avec la vie terrestre, l'air n'étant pas un solvant, toute la régulation- excrétion revient au rein ; la peau permet, éventuellement, des mouvements d'entrée et de sortie de l'eau et du chlorure de sodium.
Si, dès les premières étapes évolutives, l'organisme vertébré isole son milieu intérieur du milieu aquatique, il en dépend par contre pour supporter le poids du corps, pour respirer, pour se reproduire. Les moins perfectionnés des Vertébrés tétrapodes, les Amphibiens, restent encore pour leur régulation, pour leur respiration et pour leur reproduction étonnamment tributaires de cette eau, qu'ils ont pourtant essayé de quitter. Égarés sur terre, ils ne s'éloignent guère, à l'exception de quelques formes désertiques en Australie, du milieu aquatique ou tout au moins humide. Il y a là très probablement une des causes du minime succès de la radiation adaptative du groupe. La respiration cutanée ne peut s'accomplir qu'au travers d'une peau perméable, donc maintenue humide par du mucus qui perd de l'eau par évaporation. Le rein fonctionne à peu près comme celui d'un Poisson d'eau douce et rejette de grandes quantités d'eau pour excréter, en solution diluée, l'urée. L'œuf doit être pondu dans l'eau ; toutefois, pour cette fonction, certains Amphibiens parviennent à tempérer cet impératif et réalisent des modes[...]
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Écrit par
- Charles DEVILLERS : professeur émérite à l'université de Paris-VII
- Philippe JANVIER : directeur de recherche émérite au CNRS
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