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IVANOV VIATCHESLAV IVANOVITCH (1866-1949)

Né à Moscou, Ivanov poursuit ses études universitaires à Berlin sous la direction de Mommsen (1886) : philologie, archéologie, philosophie. À partir de 1891, il voyage à travers l'Europe, se rend en Palestine, à Alexandrie, effectue de brefs séjours en Russie, mais vit principalement en Italie. Traducteur d'Eschyle, il étudie les origines de la tragédie et le culte de Dionysos. Il publie dans des revues russes des essais : La Religion hellénistique du dieu souffrant (Ellinskaja religija stradaiuščego boga, 1904), La Religion de Dionysos (Religija Dionisa, 1905). En 1921, à Bakou, il soutiendra une thèse : Dionysos et la dionysie primitive (Dionis i pradionisijstvo). Son retour en Russie coïncide avec la révolution de 1905. Poète tardif (ses premiers vers ne paraissent qu'en 1903), Ivanov est aussitôt reconnu comme un maître par la seconde génération des symbolistes russes, notamment par Blok ; il organise des soirées littéraires, des mercredis dans sa « tour » (1905-1907), réunissant poètes, artistes, philosophes et savants. Il participe aux activités de la société philosophico-religieuse de Saint-Pétersbourg et collabore aux revues La Toison d'or (Zolotoe Runo), La Balance (Vesy), Apollon, Voie nouvelle (Novyj Put'). Ses recherches linguistiques, ses aspirations philosophiques (concilier Dionysos et le Christ, l'individualisme nietzschéen et la communauté chrétienne selon V. Soloviev) portent les espérances de ses amis symbolistes. Mais dès 1910 apparaissent des divergences entre lui et Blok ; à la même époque, les acméistes secouent le joug de l'Académie poétique, qu'il dirige de 1910 à 1912 (la jeune poétesse Akhmatova triomphe de lui dans des joutes poétiques). Il publie Tantale, une pièce très stylisée écrite dans le trimètre antique, et un recueil, Cor Ardens (1911). Après la révolution, il enseigne à Moscou, puis à Bakou ; mais dès 1924, il émigre en Italie, se convertit, devient prêtre catholique et professe à l'université de Padoue.

Chef de file de la seconde génération des symbolistes, Ivanov incarne une réaction contre le mal de vivre, le désespoir, l'obsession de la mort qui caractérisent, selon lui, l'inspiration de la première génération ; il valorise les thèmes du sacrifice, de l'amour mystique, de la résurrection, de la renaissance. Il distingue dans la culture un stade critique, dont la génération précécente aurait représenté la phase extrême, celle du décadentisme bourgeois, et un stade organique, dont le modèle serait le Moyen Âge byzantin, héritier de l'hellénisme, éducateur des Slaves, et non pas l'Occident médiéval des romantiques. Il aspire à un art religieux théurgique et condamne l'intimisme, l'impressionnisme, le culte parnassien de l'art pur. Rêvant de fondre les individualités dans une communauté spirituelle, il célèbre le théâtre, art synthétique, mystère au sens religieux, dans la participation de tous, au-delà de la séparation artificielle entre acteurs et spectateurs. Créateur de mythes comme celui de la Grèce antique, l'art dont rêve Ivanov n'en serait encore qu'au stade de la gestation, son avenir dépendrait de l'activité de quelques élus. Ainsi, paradoxalement, le poète promis à un rôle de coryphée, de maître, est réduit « provisoirement » à l'état de rêveur isolé, celui précisément qu'il condamne ! Les contradictions d'une époque troublée nourrissent la pensée d'Ivanov : attente apocalyptique de la révolution, espoir eschatologique en l'avenir radieux d'une Russie échappant aux tares du capitalisme. Au lieu d'un art poétique vivant, populaire, contemporain, Ivanov écrit pour l'éternité, renonçant à la musicalité, évocatrice de l'instant, du vers impressionniste et créant des formes figées, monumentales, immuables. Il mêle dans une incantation magique les mythes antiques aux accents de la liturgie chrétienne. L'œuvre d'Ivanov éclaire étrangement l'underground culturel russe à une[...]

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, docteur ès lettres, maître de conférences à l'université de Grenoble-III

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