HORTA VICTOR (1861-1947)
Les revers
En 1898, il dessine à la demande de Van Eetvelde les plans d’un pavillon du Congo pour l’exposition de Paris en 1900, un projet auquel le roi renonce. L’hôtel Aubecq commencé en 1899 montre un paroxysme de mouvement dans la façade, proche de l’architecture baroque. Horta n’ira pas plus loin dans cette voie. Déjà les imitations sans talent de son style font reculer une clientèle privée éprise d’exclusivité. Un recul qui s’accentue avec le succès de Horta auprès de commerçants qui lui commandent des magasins : il construit à Bruxelles l’Innovation (1900, disparu dans un incendie en 1968), sur le modèle des grands magasins parisiens, et peu après le Grand Bazar Anspach (1903, démoli) et sa succursale à Francfort-sur-le-Main (1903, démolie). Les Magasins Waucquez (1906, aujourd’hui Centre belge de la bande dessinée) et Wolfers (1909) n’exposent plus en façade de structure métallique. L’aspect de modernité provocante de celle-ci n’intéresse plus Horta : la façade des magasins Wolfers ne révèle pas que, outre la boutique de luxe, l’immeuble abritait tous les ateliers de la firme d’orfèvrerie et de bijouterie. Le retour à des formes apaisées et pures se marque dans l’hôtel Max Hallet (1902) quoique l’on retrouve, greffée sur la façade arrière, une serre à trois absides pour assouvir le désir de culture florale de la propriétaire.
En 1903, Horta reçoit la commande d’un musée des Beaux-Arts à Tournai (inauguré en 1928) dans lequel l’agencement des galeries vitrées autour d’un hall central assure une lumière et une possibilité de surveillance optimales. Le travail plastique des arêtes cède la place à des formes découpées, subtiles, qui dialoguent avec des éléments revisités du langage classique (frise, colonnes...). Horta est à un tournant. Il recherche les grandes commandes publiques qui, selon lui, inscriront davantage son œuvre dans la durée. En 1906, il obtient celle de l’hôpital Brugmann à Jette, un hôpital pavillonnaire comme le voulaient les théories médicales de l’époque, dont il a étudié le programme avec un soin extrême, en voyageant à travers l’Europe. Il se documentera de la même manière pour concevoir le palais des Beaux-Arts à partir de 1919. Le palais a été construit en un lieu idéalement situé, mais présentant des difficultés sans nombre. Sur ce terrain plus bas que ceux qui l’entourent, grevé d’une servitude de vue depuis la place des Palais, Horta a magistralement agencé une « maison des arts » regroupant des salles de concerts (la plus importante étant la salle Le Bœuf dont la qualité acoustique fit date) et des salles d’exposition appropriées à tous les types d’expression artistique envisagés à l’époque. Mais son style est déroutant : il cherche un nouvel ordre monumental, mêlant les formes géométriques de l’Art déco à un système de proportions classiques. Non loin de là, la gare centrale devait revêtir une forme semblable dans sa seconde version élaborée après son retour des États-Unis où Horta séjourne de 1915 à 1919, exilé malgré lui. La commande de la gare lui échut vers 1912 et les plans définitifs datent des années 1930, la gare n’étant achevée qu’en 1952. Malgré le titre de baron octroyé en 1932 et les grands projets qui jalonnent la seconde partie de sa carrière, Horta est amer lorsqu’il entame la rédaction de ses Mémoires en 1939, en raison du rejet de l’Art nouveau. Il fait détruire en 1939 et en 1945 presque l’intégralité de ses archives et décède le 8 septembre 1947.
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Écrit par
- Françoise AUBRY : conservateur du musée Horta, Bruxelles, Belgique
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ART NOUVEAU
- Écrit par Françoise AUBRY
- 8 824 mots
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