VILLE Le fait urbain dans le monde
L'économie et la société urbaines
La métropolisation de l'économie accompagne l'internationalisation des échanges. Le volume du commerce mondial a été multiplié par plus de 400 entre 1780 et 1980, quand celui de la population croissait moins de trente fois. La part de la production nationale qui doit s'intégrer dans les échanges internationaux s'est donc considérablement accrue. Le phénomène a pris une ampleur particulière depuis 1945, avec une évolution institutionnelle dominante favorable à une libéralisation progressive de l'économie et une réduction sensible des coûts des transactions mondiales. La valeur des échanges de services progresse plus vite encore que celle des échanges matériels. Le fait concerne en particulier le mouvement des capitaux, qui implique désormais des volumes considérables, sans rapport avec la balance commerciale, et les échanges d'informations, sous toutes les formes (images, sons, textes, signes) et sur tous les supports (téléphone, télévision, informatique...) Ces échanges de services sont organisés à partir des grandes métropoles mondiales, qui apparaissent comme les lieux de représentation et de démonstration de l'économie-monde.
Les grandes métropoles mondiales gèrent à l'échelle de la planète à la fois les échanges commerciaux, les mouvements monétaires, les flux d'informations et de services, les déplacements des hommes, ainsi que toutes les interactions entre ces réseaux.
Les niveaux supérieurs de l'armature urbaine s'organisent en trois étages : les métropoles mondiales, les capitales nationales, les métropoles régionales. Le premier est celui des entreprises multinationales dont le marché des produits ou des services est mondial, dont les capitaux sont apatrides, dont les états-majors, élites très mobiles (entre tous les aéroports, les hôtels, les quartiers d'affaires, les complexes de bureaux, les centres de congrès, les espaces technopolitains, les parcs de loisirs), proviennent indifféremment de plusieurs pays et ont suivi des formations universelles. Le deuxième, celui des capitales politiques, correspond aux États, à leurs organisations administratives, à la plupart des institutions professionnelles et syndicales encore maillées sur les espaces nationaux. Enfin, l'espace quotidien des entreprises moyennes et des populations correspond aux métropoles régionales.
« Une ville est d'abord un lieu de production. C'est pour produire plus et mieux que les hommes et les entreprises se rassemblent dans des agglomérations » (Rémy Prud'homme, « Mégavilles : économie et gestion », in Thierry Paquot Le Monde des villes). Des économistes ont ainsi cherché à mesurer la production des principales agglomérations urbaines. Tōkyō apparaît à la fois comme la plus grosse agglomération du monde et comme la plus productive : son P.I.B. est comparable à celui du Royaume-Uni. New York suit loin derrière, avec Los Angeles, Osaka, Paris et Londres, Chicago enfin. Les villes qui viennent ensuite sont deux à trois fois moins importantes. Il s'agit de métropoles européennes (dans l’ordre Düsseldorf-Wuppertal, Milan, Madrid, Rome, Barcelone), et de mégapoles du Sud ou de nouveaux pays industrielles, tels Séoul, Mexico, São Paulo, Hong Kong, Bangkok , Rio de Janeiro, Singapour... Il est intéressant de noter que le rattachement de Hong Kong à la Chine a apporté à celle-ci une élévation de plus de 16 p. 100 de son P.I.B. De nombreuses villes pèsent économiquement plus que certains pays. La production de la seule Séoul, par exemple, est comparable à celle de toute la Turquie, et celle de São Paulo dépasse la production de l'ensemble de la Pologne...
La production par habitant des grandes métropoles est partout supérieure à la production par habitant de leur pays. Par exemple, Bangkok, où résident 10 p. 100 de la[...]
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Écrit par
- Jacques BONNET : professeur de géographie à l'université de Lyon-III-Jean-Moulin, doyen de la faculté des lettres et civilisations, directeur de l'unité mixte de recherche environnement-ville-société, C.N.R.S.
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