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VILLE Mutations urbaines

Dépendances et autonomies vis-à-vis des réseaux

Les villes ont donc commencé à changer : les citadins y vivent différemment, de nouveaux lieux ont été créés, des lieux anciens se sont transformés. Ces changements sont déterminés par les évolutions sociétales que nous avons évoquées : une société composée d'individus et d'organisations plus autonomes, construisant leurs activités de façon de plus en plus stratégique, mobilisant de façon croissante les techno-sciences dans une dynamique de différenciation est une société de plus en plus complexe mais aussi de plus en plus imprévisible.

Mais les villes vont aussi changer profondément parce que la société hypertexte et « l'économie cognitive », cette nouvelle économie fondée sur la connaissance et l'information, imprègnent progressivement les modes de conception, de production et de gestion des villes elles-mêmes.

Les N.T.I.C. contribuent évidemment à transformer profondément les réseaux qui constituent l'infrastructure des villes. Dans le domaine des transports, les conceptions évoluent vite. Les N.T.I.C. devraient très rapidement permettre de nouveaux modes de régulation des trafics en temps réel, d'aide à la « navigation » des automobiles, de péages sans contacts pour les automobilistes comme pour les usagers des transports publics, qui modifieront ce secteur dans ses conceptions techniques et dans son économie. La pénétration du marketing « one to one » (des produits et des services fortement personnalisés) et de l'économie cognitive pourrait ainsi bouleverser les liens entre techniques de transport, formes des villes et pratiques sociales.

Les autres réseaux connaissent des évolutions de même nature. Dans le domaine de l'assainissement par exemple, il devient possible de limiter les lourds systèmes hiérarchisés, et de gérer des sous-ensembles mixtes, articulant des techniques d'assainissement autonome collectif avec des systèmes plus classiques.

Dans le domaine de l'énergie, l'ouverture à la concurrence, doublée des contraintes liées à l'environnement, conduira à des systèmes associant plusieurs types de sources énergétiques, comprenant même des piles à combustible domestiques.

Dans le domaine des télécommunications, on voit que les hauts débits empruntent des voies multiples : réseaux téléphoniques, câbles, réseaux électriques, radios numériques, liaisons par satellite.

Dans ces différents domaines les possibilités technologiques sont immenses, mais ce sont les dynamiques sociétales qui en détermineront le développement et les usages. On peut ainsi faire l'hypothèse, que les formes techniques et urbaines qui émergeront seront celles qui doteront les acteurs, producteurs et usagers de la ville de l'autonomie la plus grande. Les mots clés de ces réseaux seront probablement la variété et la redondance. Les citadins, les entreprises, les pouvoirs publics, et leurs jeux d'acteurs feront émerger des techniques multiples autorisant des choix, des systèmes flexibles pour que ces choix puissent être modifiés selon les circonstances, et même des solutions redondantes qui permettront de se prémunir contre les pannes. Car ces nouvelles techniques accroissent aussi la dépendance technico-économique de ceux qui les utilisent, et les acteurs s'efforceront d'avoir les moyens de s'en libérer.

Cette dynamique aura des conséquences sur les formes urbaines, dans la mesure où elle aura tendance, presque paradoxalement, à affaiblir le poids des logiques techniques. On l'a bien vu avec les télécommunications. Il y a quelques années encore, on avait transposé les problématiques classiques du transport à ce secteur et on avait inventé les téléports. Ceux-ci étaient effectivement les points de passage obligés pour qui voulait accéder aux communications par l'intermédiaire des satellites. Aujourd'hui, ces dispositifs[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'Institut français d'urbanisme, université de Paris-VIII

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Los Angeles - crédits : Chad Ehlers/ The Image Bank/ Getty Images

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