CORONELLI VINCENZO MARIA (1650-1718)
Né à Venise en 1650, Vincenzo Maria Coronelli fait ses études à Ravenne et entre chez les franciscains de Venise dès 1665. Docteur en théologie en 1673, il mènera sa vie durant une carrière de savant, de géographe et d’encyclopédiste.
À la fin des années 1670, Coronelli travaille comme géographe pour le duc de Parme, Ranuce Farnèse, qui le considère comme « le plus grand fabricant de globes de tous les temps ». Il est ensuite engagé par le cardinal d’Estrées, ambassadeur de Louis XIV à Rome, pour réaliser deux globes à l’intention du roi. Le père Coronelli fait alors un long séjour à Paris, entre 1681 et 1683, pour fabriquer ces deux globes de quatre mètres de diamètre et pesant deux tonnes chacun. L’un représente l’état de la sphère céleste et des constellations connues à la naissance de Louis XIV, l’autre fait le bilan des connaissances géographiques sur le globe terrestre. On peut toujours admirer les « globes de Marly » à la Bibliothèque nationale à Paris.
Durant son séjour, il consulte à la bibliothèque de Saint-Germain-des-Prés les deux tomes des Vrais Pourtraits et vies des hommes illustres grecz, latins et payens (1584) du cosmographe André Thevet, qui seront pour lui une grande source d’inspiration, ainsi que ses trois cents cartes d’îles gravées sur cuivre (dont il ne subsiste plus que 119 de nos jours).
« Cosmographe de la Sérénissime République », il fonde en 1684 l’Accademia Cosmografica degli Argonauti, dont l’objectif est de diffuser les connaissances géographiques dans le monde. Auréolé de sa célébrité, il effectue alors plusieurs allers et retours entre Venise et Paris (1686-1687), reste neuf ans à Venise, puis voyage deux ans en Hollande, dans les principautés allemandes et en Angleterre où il est reçu avec honneur à Oxford.
Coronelli s’est largement consacré à l’étude géographique des îles. Son œuvre est véritablement encyclopédique : considérant les îles comme des « membres disjoints du continent », il s’attachait à les dénombrer avec patience et minutie, selon le principe énumératif indispensable à une époque où chronologie et chorologie alignaient faits et lieux. Son œuvre majeure, L’Isolario dell’ Atlante Veneto (1691 et 1697) est un atlas-catalogue des îles du monde, ainsi qu’un hommage à Venise, patrie naturelle des « insulistes ».
Tirés à deux cent cinquante exemplaires, les deux tomes de cet atlas, l’un consacré à la Méditerranée, l’autre à la mer océane, répondaient à des objectifs militaire, historique et géographique. De nombreux plans de forteresses du domaine maritime vénitien, notamment de la Morée (le Péloponnèse), illustrent l’objectif militaire. Cet ouvrage représente également une prosopographie, genre fort prisé à l’époque, en créant une sorte de De virisillustribus destiné à honorer les personnalités les plus en vue de son temps. Mais, en célébrant Venise comme seule et digne héritière de l’Empire byzantin et en passant sous silence la responsabilité des Vénitiens dans le détournement vers Constantinople de la quatrième croisade, le père Coronelli fait plus œuvre politique qu’historique. Son travail doit enfin être considéré dans une optique géostratégique. En effet, la puissance de Venise a décliné au profit de sa rivale du Nord, Amsterdam. Et les efforts de Coronelli avaient pour but, en remettant au goût du jour un genre littéraire déjà passé de mode, de redonner sa première place, par l’érudition et la science, à la cité des Doges.
À son retour en Italie en 1699, il s’attela à une tâche immense avec la publication d’une encyclopédie qu’il prévoyait en quarante-cinq volumes, intitulée Bibliotecauniversale sacro-profana antico-moderna. Seuls sept tomes pourront paraître, le premier en 1701 ; mais la rigueur et la nouveauté méthodique du classement qu’il inaugure établiront[...]
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Écrit par
- André LOUCHET : professeur émérite, université Paris-Sorbonne
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