SIN NOMBRE VIRUS
Parmi 10 000 visiteurs ayant séjourné au Curry Village du parc national du Yosemite en Californie entre le 10 juin et le 21 août 2012, une dizaine ont contracté une zoonose à hantavirus et deux sont décédés. La surveillance a continué d'être de règle pour ces visiteurs pour une période de quatre à six semaines après leur visite au Curry Village. Cette surveillance a également concerné 53 familles françaises, sans maladie avérée par la suite.
Les hantavirus sont propagés par l'urine et les fèces de rongeurs, vecteurs naturels du virus. Le contact avec ces dernières ou leur inhalation est à l'origine de la plupart des contaminations. Ces virus à ARN provoquent une forte fièvre de type grippal, une atteinte pulmonaire, des douleurs musculaires et, selon la gravité de l'atteinte, une hémorragie interne diffuse plus tardive avec protéinurie, pouvant entraîner la mort. L'ensemble des signes sont ainsi ceux des fièvres hémorragiques virales. La présence du virus, et la nature de ce dernier, parmi les vingt-cinq connus, est attestée par la sérologie. Dans le cas particulier du parc du Yosemite, le virus est du type Sin nombre (le plus fréquent dans le parc). Le vecteur animal semble être ici soit Peromyscus (souris à pattes blanches), particulièrement nombreuses à Yosemite selon les témoignages, soit la souris sylvestre du genre Microtus.
Les témoignages de visiteurs sont particulièrement intéressants : les cas se sont déclarés parmi les occupants de logements provisoires dont le plancher en bois est à peine isolé du sol et dans les interstices duquel s'accumulent les restes de nourriture, constituant ainsi un lieu favorable à la prolifération des rongeurs. Les visiteurs ont noté l'abondance de cette faune à l'intérieur même de leur tente. C'est cette promiscuité qui a permis la contamination observée.
Il est important de noter que cette situation est d'une grande banalité : la mise en contact d'une population humaine avec une population animale infectée (cela vaut également d'espèces domestiques à espèces sauvages comme la propagation de la maladie de Carré des chiens aux lions en Afrique centrale) peut s'accompagner de la transmission d'une zoonose ou d'une maladie à vecteurs, selon le cas. La fièvre à hantavirus, appelée Hantaan, doit son nom à la découverte de la contamination des troupes américaines par le virus Hantaan (lui-même du nom d'une rivière proche du 38e parallèle en Corée), propagée par les rats des rizières, pendant la guerre de Corée au début des années 1950. De nombreuses maladies (virales ou bactériennes), dites émergentes, sont en réalité endémiques mais sont révélées par le contact inopiné des hommes avec un écosystème naturel infecté dont ils méconnaissent ou ignorent les risques.
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Écrit par
- Gabriel GACHELIN : chercheur en histoire des sciences, université Paris VII-Denis-Diderot, ancien chef de service à l'Institut Pasteur
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Autres références
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HANTAVIRUS
- Écrit par Jean-François SALUZZO
- 2 066 mots
- 2 médias
...Nouveau-Mexique, du Colorado et de l'Utah) était en fait un Hantavirus. Afin de ne pas blesser les susceptibilités locales, ce nouveau virus fut dénommé Sin Nombre virus, c'est-à-dire le virus qui n'a pas de nom. Le syndrome induit par ce virus est particulièrement sévère ; contrairement aux Hantavirus...