VISION Neurophysiologie visuelle
Fonction visuelle du cortex cérébral
L'aire V1
L'activité neuronale provenant de la rétine, relayée par les neurones du corps genouillé latéral, est transférée au niveau de l'aire V1, une région du cortex cérébral située à l'arrière du cerveau, qui est reconnaissable par la distribution de ses neurones en différentes couches et qui correspond à l'aire 17 de Brodmann.
Comme dans le corps genouillé latéral, on retrouve dans V1 une représentation rétinotopique de l'hémichamp visuel controlatéral, c'est-à-dire que chaque région de cet hémichamp visuel est codée par une population de neurones localisée dans une petite zone de l'aire V1. Cette représentation est en quelque sorte inversée, la partie supérieure (respectivement inférieure) de l'hémichamp visuel étant représentée dans la partie inférieure (respectivement supérieure) de V1 (berge ventrale de la scissure calcarine). La fovéa est représentée dans la partie postérieure, au niveau de l'occiput chez l'homme, et la zone de frontière entre les aires V1 et V2 contient des neurones dont le champ récepteur est situé sur le méridien vertical, constitué par la ligne verticale passant par le point de fixation. La partie centrale du champ visuel est fortement représentée, puisque les vingt degrés centraux qui ne correspondent qu'à une faible fraction (3 %) de l'étendue totale du champ visuel sont codés par la moitié de la surface de l'aire V1. Cette représentation surdimensionnée de la région centrale du champ visuel est la conséquence de la forte concentration de photorécepteurs et de cellules ganglionnaires dans la région correspondante de la rétine.
Deux grands changements se produisent au niveau des neurones de l'aire V1 par rapport à ceux du corps genouillé latéral (D. H. Hubel, 1994). La plupart répondent à la stimulation visuelle par l'intermédiaire des deux yeux (on dit qu'ils sont binoculaires). Cette propriété permet un premier codage de la profondeur dans le champ visuel par les mécanismes de vision stéréoscopique. Par ailleurs, la majorité des neurones de V1 répondent de façon sélective à certaines orientations des stimuli visuels. Alors que la rétine réalise un codage point à point de l'image d'un objet, l'aire V1 privilégie les bords entre les zones de luminance ou de couleur différentes et code l'orientation de ces bords.
L'étude des bases structurelles de la sélectivité à l'orientation des neurones de l'aire V1 a donné lieu à de nombreux travaux depuis la découverte de cette sélectivité par Hubel et Wiesel en 1962. L'hypothèse initiale était que la première étape de la sélectivité à l'orientation est réalisée dans une cellule de type « Simple », caractérisée par un champ récepteur avec des régions on et off séparées et alignées avec l'orientation optimale (celle qui donne la réponse la plus forte). Les zones on et off proviendraient de la convergence d'afférents de type on et off en provenance du CGL et seraient à la base de la sélectivité à l'orientation par un mécanisme similaire à celui de l'interaction antagoniste entre centre et pourtour dans la rétine. Dans un deuxième temps, les cellules « Simple » convergeraient sur des cellules de type « Complexe » qui donnent des réponses de type on-off dans tout le champ récepteur et hériteraient de la sélectivité à l'orientation des cellules « Simple ». L'hypothèse initiale de Hubel et Wiesel est toujours l'objet de débats et il n'existe pas de consensus sur les bases structurelles de la sélectivité à l'orientation. En particulier, il est bien établi que la sélectivité à l'orientation est fortement affinée par des interactions inhibitrices provenant d'autres neurones corticaux et n'est donc pas uniquement le résultat d'une convergence[...]
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Écrit par
- Jean BULLIER : directeur de recherche au C.N.R.S., directeur du centre de recherche cerveau et cognition, université Paul-Sabatier, Toulouse
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