VITALISME
Vitalisme ou matière vivante ?
En ce début de xxie siècle, les remarquables propriétés du vivant apparaissent plus évidentes que jamais. Dans quelle mesure les données « postgénomiques » de la biologie moderne convaincraient-elles un vitaliste du xixe siècle que la nature de la matière vivante est aujourd'hui comprise ? Les gènes détiennent-ils les informations nécessaires et suffisantes à la formation et au fonctionnement d'une cellule, au développement d'un embryon ? ou bien devons-nous continuer l'exploration de plus en plus fine de la nature physico-chimique des systèmes vivants ?
S'il était permis de jeter un dernier regard au vitalisme, ce serait pour souligner notre besoin d'aller au-delà de l'analyse génomique et protéomique. Le génotype ne peut plus prédire aujourd'hui l'actuel phénotype mais peut nous fournir une connaissance de l'univers des phénotypes possibles. Les systèmes biologiques ont évolué en limitant ces phénotypes qui pourraient dépendre autant des conditions extérieures et des événements aléatoires que des structures moléculaires codées par le génome. Dans un tel monde indéterministe, les espèces ont acquis par essais-erreurs, par apprentissages successifs, une embryologie et une physiologie très stables. C'est cette robustesse qui suggère l'idée de « forces vitales » et c'est cette robustesse de la matière vivante qu'il faut en fin de compte chercher à comprendre. L'apprentissage, irréductible à la logique, à la physique et à la chimie, serait la propriété même du vivant. Si les lois de la physique et de la chimie ne peuvent prétendre fonder les lois du vivant, la biologie serait alors hors du champ des lois physiques établies actuellement, et devrait prétendre à l'extension de ces lois. Schrödinger écrivait déjà, il y a près de soixante ans : « Il se pourrait donc bien que l'être vivant, loin d'échapper aux lois physiques, mette en jeu d'autres lois de la physique, encore inconnues, mais qui, une fois révélées, feront tout autant partie intégrante de cette science. » La « vitalité du vitalisme » permettra-t-elle que la biologie advienne réellement après la physique, la dépassant et l'englobant : une méta-physique en quelque sorte ?
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Écrit par
- Marie-Christine MAUREL : professeur à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie, Institut Jacques-Monod
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