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EFIMOV VITALY (1938- )

Physicien russe, Vitaly N. Efimov est né en 1938 à Leningrad (aujourd’hui Saint-Pétersbourg). Après sa thèse soutenue en 1966 à l’institut physico-technique Ioffe de cette ville, Efimov a publié en décembre 1970 un court article de deux pages intitulé « Niveaux d’énergie dus aux forces résonantes à deux corps dans un système à trois corps » dans la revue européenne PhysicsLetters. Il y démontrait l’existence de séries d’états liés de trois corps quand bien même les forces en action n’étaient pas suffisantes pour lier deux de ces corps. La condition nécessaire à ce phénomène est que la longueur de diffusion dans le milieu (c’est-à-dire la taille caractéristique des corps en interaction) soit beaucoup plus grande que la portée des forces. Efimov appliquait ce raisonnement aux systèmes soumis à l’interaction nucléaire forte, en particulier au noyau de tritium constitué de trois nucléons, et au noyau de carbone formé par trois particules alpha. Il soulignait que le nombre d’états liés peut être très grand et que les niveaux d’énergie successifs sont approximativement reliés par une loi d’échelle : l’énergie d’un niveau est environ 23 fois supérieure à celle du niveau précédent (ce nombre 23 vient de e). La prédiction d’Efimov ne fut pas prise très au sérieux à l’époque et la physique nucléaire s’orienta vers d’autres méthodes pour élucider la structure des noyaux atomiques. De fait, l’importance de l’interaction coulombienne entre les protons et le caractère fermionique des nucléons empêchent que les conditions d’existence des états d’Efimov soient remplies dans ces systèmes. Après avoir émigré aux États-Unis en 1989, Efimov devint professeur à l’université de Washington à Seattle.

Il apparaît maintenant que le résultat d’Efimov s’applique plutôt aux systèmes atomiques régis par l’interaction électromagnétique, et en particulier aux gaz atomiques à très basse température qu’on sait réaliser depuis les années 2000. En 2006, l’équipe du professeur Rudolf Grimm de l’université d’Innsbruck (Autriche) a démontré la pertinence de ce concept dans le cas d’un gaz d’atomes de césium confiné dans un piège optique et refroidi vers 10 nanokelvins. Pour atteindre les conditions d’existence de l’état lié, les physiciens autrichiens tiraient profit du fait que l’intensité de l’interaction entre ces atomes est modulable par l’application d’un champ magnétique contrôlé. Dans les années qui suivirent, des résultats semblables furent démontrés pour des atomes de potassium et de lithium. En 2009, l’observation de deux états trimères de potassium apporta la première indication de la justesse du facteur d’échelle prévu par Efimov. En 2014, une expérience décisive menée à l’institut de physique d’Innsbruck par Grimm, ses collaborateurs et le théoricien britannique Jeremy M. Huts a prouvé l’existence de deux états trimères de césium séparés par un facteur d’échelle de 21,0, avec une incertitude estimée à 1,3. La distance caractéristique entre les trois atomes du deuxième état lié est d’un micromètre, ce qui fait de ce trimère une structure gigantesque très difficile à contrôler et à mesurer. La publication de ce résultat dans la revue américaine Physical ReviewLetters de mai 2014 a convaincu la plupart des spécialistes de la réalité des états d’Efimov. Comme le raisonnement théorique a un caractère universel, il reste à savoir si ce phénomène apparaît dans des états plus naturels que les gaz atomiques ultrafroids et pour les interactions nucléaires qui avaient été la source d’inspiration d’Efimov.

— Bernard PIRE

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Écrit par

  • : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau

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