MAIER VIVIAN (1926-2009)
Une notoriété posthume
Rompant avec ses années partagées entre deux mégapoles américaines, Vivian Maier embarque en 1959 à bord d'un cargo mixte pour un voyage de six mois qui la conduit en Europe, en Afrique et en Asie et dont elle rapporte quelque cinq mille clichés. Cependant, les tirages réalisés en chambre noire ou commandés aux laboratoires professionnels n'auront d'autre spectateur que leur auteure qui les range en boîtes entassées dans les sous-sols des familles qui l'emploient. Solitaire et curieuse, Vivian Maier suit l'actualité artistique, fréquente les galeries, les musées et chronique à l’occasion les faits divers. Au milieu des années 1980, elle s'essaie à la photographie en couleurs et au cinéma super-8 dont elle tire des compositions esthétiques et formelles, sous forme de photogrammes ou d'autoportraits en plans fixes. Retraitée en 1996, logée par les soins des enfants Gensburg, Vivian Maier cesse de photographier en 1999, confiant au garde-meubles des archives bientôt laissées en déshérence.
La nouvelle de la découverte posthume de John Maloof se répand à partir du site Internet qu'il dédie à ce fonds de quelque cent mille négatifs répertoriés par l'Estate Vivian Maier-collection John Maloof et dans les pages de sa monographie Vivian Maier, Street Photograher, parue en 2011 aux éditions Powerhouse. Au mois de décembre de la même année, l'accord passé avec le galeriste new-yorkais Howard Greenberg aboutit à une première exposition Vivian Maier : Photographsfrom the Maloof Collection. À Paris, Françoise Morin obtient la représentation exclusive pour la France de la collection John Maloof. L’exposition Vivian Maier (1926-1929), une photographe révélée qu’elle monte au mois d’octobre 2013 dans sa galerie Les Douches présente à son tour une artiste atypique, dont la passion de photographier restait étrangère à l'ambition commune de montrer et de publier. Cette révélation de l'œuvre trouve un écho dans l'édition : John Maloof publie deux autres ouvrages, Vivian Maier : Self-Portraits (PowerHouse Books, 2013), Vivian Maier : A PhotographerFound (Harper Design, 2014), et les historiens Richard Cahan et Michael Williams deux autres livres : Eye to Eye, Photographs by Vivian Maier (CityFiles Press, 2012) et Vivian Maier : Out of the Shadows (ibid., 2014).
En 2021-2022, la Réunion des musées nationaux-Grand Palais a présenté au musée du Luxembourg l’œuvre singulière de Vivian Maier. Organisée avec le concours de la collection John Maloof de Chicago, de l'organisation madrilène diChroma photography et de la Howard Greenberg Gallery, cette exposition a fait le choix de répartir les 278 photographies en sections thématiques, séparant les autoportraits, la photo de rue, les détails des choses vues, le portrait de contemporains, la recherche esthétique, la photographie couleur et le film expérimental. Parcours raisonné établi à la suite de l'inventaire d'un collectionneur et des options de deux institutions, la scénographie du musée du Luxembourg vient conforter le paradoxe d'une œuvre produite avec passion, sans projet de visibilité.
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Écrit par
- Hervé LE GOFF : professeur d'histoire de la photographie, critique
Classification
Média